sujet 12/2018 - clic
On était en mai 2018 : c’était à nouveau la révolution. Les retraités défilaient par milliers pour retrouver leurs droits : les chômeurs réclamaient plus d’alloc, les travailleurs moins de travail, les infirmières plus de postes, les médecins plus de moyens, les femmes plus de respect, les cheminots des voyages à l’oeil, les ophtalmos plus de chalazions, les pompiers plus d’incendie, les hôteliers plus d’ensoleillement, les libraires plus de clients, les auteurs plus de lecteurs, les enfants moins de devoirs, les enseignants moins d’heures, les facebookers plus d’amis, les youtubers plus de « j’aime », les bébés plus de biberons, les cabots plus de croquettes, les matous moins de cabots, les agneaux moins de loups, les loups moins de chasseurs, les jardins moins de glyphosates, les déserts plus de pluie, et les Français le retour du corps de Johny au père Lachaise.
Il est permis d’autoriser, lisait-on sur une pancarte plagiant mai 68, ce qui s‘était vite transformé en …Il est permis d’autoriser le permis motorisé. Car on maniait l’humour et la blague avec dextérité en ce temps-là (même si on maltraitait la grammaire et l’orthographe) et on ne dédaignait pas non plus les jeux de mots, seule vraie détente dans un monde en marche, cruel et impitoyable. Mai 68 nous avait donné : sous les pavés la plage… 50 ans plus tard, on pouvait lire sur des façades dégradées par le temps : sous les épaves la plage, triste souvenir de l’échouage de l’Amoco Cadix en 1974, de l'Exxon Valdez en 1989, du Prestige en 1999, et de l'Erika, en 2002.
L’art, c’est de la merde s’était transformé en L’art, c’est du nanan, phrase que personne ne comprend plus actuellement, sachant que le nanan, petit fromage délicieux et crémeux genre cancoillotte a disparu de nos assiettes il y a fort longtemps déjà.
Il faut l’avouer : ce n’est pas la révolution qui mène à la victoire mais bien les pancartes et les graffitis qui les accompagnent. J’emmerde mon oncle Maxime, lu quelque part dans une rue de Paris est sans doute la plus représentative. Car il n’est pas utile d’avoir fait Sciences Po pour comprendre que si l’on remplace le prénom Maxime par n’importe quel autre prénom, cette assertion franche et directe aura toujours autant de poids. Et ne vous interdira pas de vous réjouir, car compte tenu du nombre de Maxime en France (ou de Thierry, Loïc, Thomas, Quentin, Nicolas…) vous ne serez soumis à aucune poursuite.
Bis repetita, les révolutions se suivent et se ressemblent, vues sous cet angle, elles ont un aspect sympathique, mais ne nous y fions pas trop : si on interdit d’interdire, si on autorise à autoriser, question écologie, on pourrait peut-être un jour rencontrer sous les pavés autre chose que la plage, mais plutôt le genre de matière dont serait fait l’art, selon nos bons amis soixantehuitards. En tout cas, ça pourrait bien emm... un tantinet l’oncle Marcel…pardon, l’oncle Maxime !
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