Sujet semaine 23/2016 - clic
Elle m’a demandé si j’avais la nostalgie de mon village…
Je ne l’exprimerai pas ainsi ; ce n’est plus le mot adéquat ; oui, c’est ça, je sais désormais que le sentiment que j’éprouve pour mon enfance, notre maison, ma Provence, ne se nomme plus nostalgie …
Et cherchant le bon terme, je ne peux m’empêcher de poser quelques questions fondamentales :
- Demande t-on à un hérisson de se faire des tresses ?
- Demande t-on au Père Noël de se raser la barbe ?
- Demande t-on à un matelot de chasser le Dahu à coup de lances dans une gare ?
- Demande t-on à un estuaire de se jeter dans la bouche d’égout ?
- Demande t-on à un chef de gouvernement de vomir face à la statistique ?
- Demande t-on au cercle d’être perpendiculaire ?
Je ne sais pas ; je ne crois pas …
Je ne sais plus finalement qu’elle est la nature des souvenirs qui m’habitent.
Je sens que j’ai vraiment fait peau neuve.
Je vois tout autrement.
Même ce petit village je le vois autrement.
Je ne ressens plus ni regrets ni rancune quand j’y songe.
Je me suis repentie de cette rage folle qui m’a habitée si longtemps ; j’ai enfin pardonné.
Non je n’ai pas de nostalgie car je sais que le temps passe, que tout change, que tout se transforme, se déforme et surtout les souvenirs !
Je le sais et désormais je vis dans la Paix.
J’observe tout, partout, tout le temps et l’âme en voyage permanent, allongée sur une chaise longue, j’hume le parfum des amandes fraîches et du fenouil dans mes rêves, j’entends le clapotis des vagues du lac enroulée dans un plaid, je ressens la fraîcheur du mistral sur ma peau et je vois le gris de la roche qui s’effiloche dans mes cheveux vieillis…
Non je ne regrette rien ; je ne suis plus en manque.
Non je ne suis pas nostalgique ; je n’ai plus cette peur panique de rater quelque chose, un évènement, un potin, une naissance ou un décès, un coucher de soleil, un éclat de rire…
Ce mot – nostalgie – ne me fera pas entrer à nouveau dans ce que j’ai cédé au monde.
Je ne veux plus juger.
Je ne veux plus envier.
Je ne veux plus me tordre de douleur devant la perte…
Je ne juge plus.
Je n’envie plus.
C’est fini et tout commence ….
Enfin !
Je vis, au jour le jour, ici et non plus là-bas et mon jardinet bourguignon est tout aussi merveilleux que la fontaine d’eau fraîche devant laquelle j’ai fait mes premiers pas …
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