atelier d'écriture en ligne
sujet 19/2018 - clic
Il ne viendra pas, ça j’en suis bien sûre. Il va faire comme la dernière fois : prétexter un embouteillage, un appel urgent, une réunion de dernière minute ! J’aurais dû prendre un taxi tout de suite, ça m’aurait évité d’attendre au milieu de ce trafic et des curieux qui me regardent avec un sourire entendu du genre : t’as vu, hi, hi, encore une qui s’est fait poser un lapin.
J’appellerais bien sur son portable, mais il n’attend que ça, le cruel. Il a hâte d’entendre ma voix impatiente virer graduellement de l’agacement contenu à la franche colère pour terminer sur un raccrochage au milieu de la conversation. C’est un pervers, il adore me faire du mal, tout en se trouvant de bonnes excuses, j’aurais tant aimé, CHÉRIE, te cueillir à l’aéroport, et bla bla bla, et bla bla bla. Ah, pour un beau causeur, c’en est un : jamais à court d’arguments, toujours une bonne excuse, un bon prétexte pour vous laisser choir comme ça, en pleine rue, après un voyage harassant de deux jours, sans compter les grèves, les retards, les pannes, j’en passe et des meilleures.
J’aurais dû céder aux avances de ce cher Joan, rencontré à l’hôtel La Playa, il n’a peut-être pas le physique de mon homme, mais alors, quelle galanterie, me porter ma valise jusqu’à la porte de ma chambre, être attentif au moindre de mes besoins ou de mes désirs. M’offrir un mojito en me charmant de ses jolis airs andalous. Et ce regard, ce regard de feu que je n’oublierai jamais. J’ai été trop bête, tiens.
Lui, de son côté, je suis sûre qu’il a profité de mon absence pour s’envoyer en l’air avec sa bêtasse de secrétaire qui lui court après depuis le début. J’ai bien vu leur manège. Et puis, elle est bien trop aimable avec moi, c’est un signe qui ne trompe pas : bonjour Madame Janot, ça va Mme Janot, pas trop fatiguée Madame Janot ? Je lui en donnerais, tiens, des Mme Janot, elle va comprendre sa douleur. Ah, ce n’est pas elle qu’il aurait fait poireauter comme ça pendant des heures !! Bon, je me calme, j’attends encore cinq minutes et j’appelle un taxi.
Sonnerie de portable : Allo ? C’est toi, Eric ? Ah, c’est vous Joan, quelle bonne surprise. Oui, je suis bien arrivée, j’attends mon mari, là, comme une idiote, sur le bord de la route. Oui, très bon voyage. Il fait beau ? Ca ne m’étonne pas. Vous revoir au prochain congrès ? Attendez un instant, on m’appelle. C’est toi Eric ? Tu ne peux pas te déplacer, tu es en débriefing ! Pas grave, je me débrouille, à plus tard, chao. Allo, Joan ?... Mais pourquoi pas ?... Ce serait avec plaisir Joan…Je vous préviens dès mon prochain séjour…. Je vous manque ?... Oui, moi aussi…Oui, bises à vous …muchos besos...A bientôt Joan.
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