Vous permettez, Mam'zelle Adèle ?
J'vous ai apporté des fleurs, toutes fraiches. Mais j'les cache, parce que mon vieux, là-bas, planté devant l'hôtel des flots bleus,
i'm'surveille. I' garde son bien. I' veut pas que j'vous fréquente.
I'm' dit, sauf vot' respect, qu'vous avez la cuisse légère.
Mille pardons, Mam'zelle Adèle, il vous voit pas comme je vous vois ! C'est pas légère qu'elle est, vot' cuisse ! Elle est crémeuse,
onctueuse, moelleuse, tout comme j'aime !
Ah, Mam'zelle Adèle, vos cuisses, vos épaules, vos bras, et... tout l'reste, ça m'fait rêver, si vous saviez !
J'vais p't'et' bien vous les glisser sous la table, les tulipes, parce que je vois arriver le gros Lulu, le serveur ! Et c'te
punaise, il est toujours à cafter à mon vieux, m'étonnerait pas qu'il cherche à m'déshériter ! Déjà qu'il fait du plat à ma soeur, c'te dinde qui s'fait bronzer sur un transat, dans l'fond avec
sa copine.
Vous verrez comme elles sont belles les tulipes : de deux couleurs, des rouges et des jaunes, et y'a marqué « plaisir d'offrir » sur
le papier, parce que c'est un plaisir pour moi d'vous les offrir. Tel que.
Vot' gamin, quand même, j'aimerais bien qu'vous lui disiez de s'tenir un peu à carreaux. Si mon vieux i'l'voit grimper sur
l'réverbère en résine tout neuf, après déjà qu'il ait tiré la queue de son clébard, et envoyé son ballon sur la tête du notaire qui prend son pastis derrière, j'suis pas sûr qu'il ait trop envie
de devenir grand père…
Emma