Chaque été, nous étions invités par Colette, ma collègue et amie, dans sa maison de campagne, à Pralois, petit hameau du village de
La Valla sous Rochefort, dans les monts du Forez.
On y passait des moments merveilleux à se promener dans les bois alentours, pour y cueillir girolles, myrtilles et
framboises.
Les enfants revenaient chargés de seaux pleins de ces fruits odorants et la couleur du pourtour de leurs bouches attestait sans
contestation possible de leur part de leur gourmandise.
Dans la grande cuisine, nous passions le reste de la journée à confectionner des confitures sur le vieux fourneau puis le soir nous
mangions la fricassée de girolles accompagnée d’une salade de pissenlits aux lardons.
La maison était une ancienne école que Colette avait aménagée de façon spartiate pour y passer ses week-ends et ses vacances. Pas de
chauffage, hormis une grande cheminée dans l’ancienne classe pompeusement rebaptisée « salon » et un fourneau dans la cuisine. Rien dans le reste de la maison…
A huit cents mètres d’altitude, même en plein mois d’Août, les soirées sont fraîches et les nuit, plus que cela encore. Aussi, après
quelques parties de Monopoly ou de sept familles endiablées, tous serrés autour de la table de la cuisine, à côté du vieux fourneau, nous allions nous coucher de bonne heure.
Dans les chambres, le froid et l’humidité régnaient. Il était donc de tradition que chacun avant de monter, récupère une brique*
auprès de Colette. Elle la sortait du four, brulante pour qu’elle conserve sa chaleur le plus longtemps possible, avant de nous la donner, roulée dans un papier journal afin qu’on puisse la tenir
contre soi, malgré tout…
On en bassinait les lits afin de pouvoir coucher dans des draps tiédis puis on la conservait à ses pieds, sous les
couvertures.
La chambre d’amis avait l’apparence d’un dortoir avec ses quatre lits qui se suivaient.
On enfilait de gros pyjamas épais et l’on se fourrait sans trop attendre sous les deux couches de couvertures recouvertes du dessus
de lit matelassé.
Je n’ai jamais aussi bien dormi qu’à Pralois, bien au chaud sous les piles de couvertures, les pieds grillés sur la brique mais le
nez et les joues offerts à l’air froid.
Il nous est arrivé de monter à Pralois à l’automne, lors des vacances de Toussaint. A cette période, il gelait carrément. Le matin,
le givre recouvrait les vitres de la chambre au-dedans comme au dehors. Nous faisions de la buée en nous parlant, d’un lit à l’autre.
Sous les triples ou quadruples couches de couvertures, nous avions rajouté au pyjama, une veste en laine, des chaussettes et un
bonnet… sans oublier bien sûr, la fameuse brique !
Mais là encore, un vrai bonheur ! Malgré les vieux matelas défoncés, dans des lits qui ressemblaient à celui de la chambre de Van
Gogh, nous nous endormions avec, à la fenêtre, un spectacle de nuit étoilée sur lequel nous avions tiré un épais rideau de cretonne afin d’essayer de rendre l’atmosphère de la pièce plus
douillette et de garder l’illusion que nous étions parvenus à laisser le froid à l’extérieur.
*Briques chauffeuses :
Elles existent et se vendent toujours.
Comme celle de nos Grand'mères elles sont en céramique réfractaire émaillée en brun. On les réchauffe dans les fours et poêles
conventionnels soit dans un four à micro-ondes de bonne puissance. Puis on les dépose entre les draps du lit, entourée d'un linge pour éviter toutes brûlures.
Mamido