Ca y est, j’ai encore hérité des pingouins de la semaine dernière ! Ils vont encore me remplir à ras bord et je passerai la semaine à
soigner mon dos et à avaler des cachets contre la douleur !
A bas la société de consommation ! A bas les caddies de grande dimension qui incitent à acheter plus, toujours plus ! Allez, et dix
kilos de sucre, dix boîtes de cassoulet, quinze kilos de viande, cinq paquets de bonbons et vingt baguettes, on dirait qu’ils vont tenir un siège.
Si encore ils se dépêchaient et me ramenaient vite à mon garage, mais non, ils tatillonnent, hésitent, partent et reviennent au même
rayon, deux fois, trois fois, reposent les marchandises parce qu’ils ont trouvé plus loin une promo. Sans compter les cris des mômes qui veulent un petit jouet, un paquet d’Haribo, ou le dessert
au chocolat le plus cher du magasin.
- Ludo, tu me rends chèvre, veux-tu aller reposer ça tout de suite ?
Le petit dernier a réussi à tirer trois tablettes et fait tomber le reste de la pile. Ses frères se bidonnent, la mère est au bord de
la crise. Et moi avec.
- Chloé, va chercher ton frère avant qu’il ne fasse un nouveau malheur.
Tout à coup, un bruit assourdissant : cette fois, c’est la pile de petits pois-carottes qui s’est écroulée ; on n’est pas passé loin
du désastre.
-Madame, quand on a de tels enfants, on ne les emmène pas en courses. Ah bravo, Françoise Dolto, je ne vous dis pas merci
- Dites donc, vous, vous feriez mieux de vous occuper de vos fesses, on voit que vous n’avez jamais eu d’enfants !
On en vient aux mains, la bagarre fait rage ; le surveillant est appelé en renfort. C’est un grand malabar, avec des muscles
saillants et des mains comme des battoirs ; je ris sous cape. Un peu de diversion, ça fait du bien !
Aïe, l’andouille, qu’est-ce qu’ils ont encore ajouté pour me faire aussi mal ? J’ai les tripes en bouillie ! Une fourche pour le
jardin, il ne manquait plus que ça. Ca consomme à tort et à travers, ça oublie de regarder les étiquettes et la provenance des marchandises et ça prétend cultiver bio ! Je t’en fiche mon billet,
écolo de mes quatre…roues !
Pourvu que la journée soit calme ! Sans cela, je sens que je vais craquer. Quand je pense à l’autre là-bas, qui a eu la chance de
rentrer au bercail parce qu’il avait une roue voilée ! Ca ne m’arrivera pas de si tôt, vu qu’ils viennent seulement de m’acheter ! Vous avez vu ma couleur ? Une couleur improbable, innommable, je
me demande comment ils font leurs mélanges, chez Leclerc ! Heureusement que je ne mange pas de conserves, j’aurais un doute sur le contenu des boîtes.
Bon, là, on passe à la caisse, ça fait deux heures que je suis sur mes roues, j’en peux plus, je suis crevé, enfin, façon de parler,
il est temps que je me repose, pourvu qu’on ne vienne pas me rechercher tout de suite pour un nouveau tour !!
Dur, dur, le métier de caddie !
Cloclo