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22 décembre 2013 7 22 /12 /décembre /2013 10:44

 

La nuit tombe sur le quartier du Jarret à Marseille.

Les rares chalands remontent leur col en rasant les murs sans même jeter un coup d'oeil aux besogneuses.
 
“Adieu, bimbo!”
“Adieu! Si c'est pas une misère, Malou”
“Tu l'as dit... une misère, les corbeaux volent sur le dos. Deux heures que j'ai pas mis les miches au chaud!”
“On pourrait croire qu'avec ton nouveau costume, ça marcherait mieux”
“Comment veux-tu marcher avec ça? Y'a qu'mon maquereau pour avoir des idées pareilles, sans compter l'miroir et l'peigne! On dirait Marie-la-folle”
“C'est vrai que pour arpenter le trottoir, ça doit pas être fastoche”
“Si j'avais su qu'un jour j'aurais b'soin d'agiter la queue pour faire mon beurre”
“C'est la crise, Malou. C'est la crise et avec leur nouvelle loi sur la pénalisation, le client qui a des oursins dans les poches va avoir mal aux bourses”
“A deux ans d'la retraite, ma vieille, j'y étais pas préparée et mon maquereau non plus. Toi t'es jeune! Comment tu vas l'préparer le tien?”
“Surement au four avec une sauce moutarde et estragon”
“Déconne pas! A ta place je m'inquiéterais. Le mien y m'a même changé mon p'tit nom. Maint'nant c'est Pisinoé... parait qu'ça veut dire Persuasive!”
“Pisinoé? Toi qu'on a toujours appelée la grosse Malou, ça doit te faire drôle”
“Oh pour le peu d'fois qu'on m'appelle pour aller au beurre”
“Et c'est pas trop chiant à défaire ce machin pour aller changer l'eau aux olives?”
“M'en parle pas! J'ai des clients pressés qui s'tirent avant que j'aie fini de déballer mes arpions!”
“Faut dire qu'y sont vachement pressés maintenant, rapport à la contredanse de cinquième classe”
“J'sais pas c'qu'il leur faudrait pour leur faire tourner la tête... leur chanter des chants de Noël?”
 
“Parait qu'au Prado la Léontine vient de se mettre en poulpe”
“Tu veux p't'être dire qu'elle s'est mise en couple passequ'elle est en poulpe toute l'année, même que son mac l'appelle la tentacule!!”
“Si c'est tout ce qu'il a trouvé comme nom pour une tante...”
“Bref, tout ça pour dire qu'on est dans la mouscaille, ma vieille. Le plus vieux boulot du monde a du souci à s'faire! Enfin, j'te dis ça mais c'est le parler qui fait parler”
“Adieu... Pisinoé... Putain, ça fait drôle!”
 
Vegas sur sarthe
 
21 décembre 2013 6 21 /12 /décembre /2013 18:28
 
Une petite sirène
Au bord de l’eau
Si belle et si étrange
A sa toilette était.
Une petite sirène
Qui, un air fredonnait.
Cet air là, me disait
Laisse-toi capturer.
 
Cette petite sirène
Son chant, m’a captivé.
Avait cette beauté
Que longtemps, j’ai cherchée.
Ses gestes étaient graciles
Plus rien ne m’importait.
Et j’étais là, imbécile
Devant tant d’harmonie.
 
Aujourd’hui prisonnier
De ce rêve illusoire,
Je suis là, attendant
Cet air qu’elle fredonnait,
Rien que pour moi, je le croyais.
Mais bien d’autres avant moi,
Dans ses filets, retenus,
A jamais sont disparus.
 
Ma vie, n’a plus de sens,
Ni de contre sens,
Encore moins de raison.
Je suis là, à l’attendre,
Apparition magnifique.
Tu m’as ensorcelé,
Toi, petite sirène,
Qui sait si bien chanter.
 
Je t’en prie, libère-moi !
Es-tu ma Lorelei,
Celle que les marins
Espèrent et redoutent à la fois.
Ma petite sirène
Coiffe ses longs cheveux
Pour s’en faire cette traîne
A laquelle je m’enchaîne.
 
Tu m’as bien envoûté
Et sous ces falaises
A l’ombre des rochers
Toujours, je vais rester.
Mon âme par toi enchantée
A rejoint mon corps
Qui déjà a sombré.
Ma petite sirène,
Pour moi, continue à chanter.
Ma petite sirène,
Toi, toujours je désirerai
Et jamais ne me lasserai.     
 
Jaclyn O'Léum
20 décembre 2013 5 20 /12 /décembre /2013 19:56

 

Quand les étoiles scintillent 
Loin des hangars affreux
Des lointaines banlieues
Ce palais du désir
Temple du plaisir
Au temps où l’architecture édifiée
Offraient la beauté
Des ferronneries et des coupoles
Où les oiseaux volent
Dans la lumière au cœur de la nuit
Pour les yeux des passants éblouis

 

Josette

19 décembre 2013 4 19 /12 /décembre /2013 18:27

 

Je m'étais dit -en touriste qui voulait sortir des sentiers battus- que je tournerais le dos à l'histoire de France des siècles trop lointains. Pour une fois !

Et je m'étais prévu un de ces week-ends frôlant un jour férié et rejoint par un jour de congé, que nous autres, français, appelons « pont ».

À ne pas confondre avec le Pont Neuf... qui -comme chacun sait- date du dix-septième siècle !...
Donc... foin de Notre Dame, du Louvre, de La Madeleine et autres brontosaures du tourisme ! J'avais opté pour le Petit Palais : parcouru une journée entière à la force du mollet, de l'usure des semelles, de mes lunettes même au vu de mon émerveillement.
J'en avais eu le souffle coupé.
- Énergie où es-tu ? m'étais-je écriée au retour, en me laissant tomber sur mon lit. 
- Courage ! avait répondu Conscience. Un petit tour aux Galeries Lafayette demain te détendra ! Et finira dans la foulée, ce beau périple parisien, avant la grisaille de la province !
Que n'avais-je pas prévu ? Le bruit des clients acharnés à leurs courses ? La chaleur ? Les enfants ? Le sapin ?
Prise d'un tournis ému, je cherchais l'air, la hauteur, pour sortir de ce brouhaha joyeux. Et là, je la vis...
Coupole transparente d'or et de lumière, voute somptueuse qui m'évoqua par son éclat celle du Titanic. Un Titanic sauvé des eaux, témoin miraculé d'une époque perdue, échoué au milieu de monstres en béton.
Résiste au temps, voute légère aussi impalpable qu'un tulle de mariée brodé d'étoiles ! Témoigne aux hommes que la beauté peut aller de pair avec... les affaires !
Peut-être, un jour, retrouveront-ils... l'art de vivre ?

 

Christiane

19 décembre 2013 4 19 /12 /décembre /2013 09:39

 

“Alors y m'dit comme ça... vous viendriez pas admirer la coupole avec moi?”
“Mais qu'est-ce qu'ils ont tous les mecs avec cette coupole?”
“Alors j'lui répond du tac au tac: Non merci monsieur! Pas avec les clients du magasin et que j'l'ai déjà admirée avec mon chef”
“Ah, ça y est, toi aussi? C'est toujours monsieur Jean?”
“Euh... Oui. Y parait qu'les nouvelles ont intérêt à faire le stage...Euh... machin bisantin...”
“Le cours d'initiation à l'art néo-byzantin, ma grande! J'ai connu ça avant toi”
“Ouais, c'est juste ça!”
“Je suppose qu'il t'a emmenée au balcon Nord, là où on voit le mieux la verrière, par en dessous...”
“Alors non. On était au rayon canapés... c'est là où je bosse et c'est là aussi où on profite bien de la vue”
“Et il t'a dit: Vous allez jouir du spectacle avant d'avoir eu le temps de compter les dix faisceaux de vitr...”
“Alors non. J'ai eu un orgasme tout de suite”
“A ce point-là? Il a dû t'expliquer l'Art Nouveau et l'histoire des deux cousins alsaciens qui ont créé...”
“Alors non. J'aime pas quand on est trop nombreux!”
“Mais il t'a parlé des motifs floraux sculptés, au moins?”
“Alors non. Mais j'avais compris son motif, tu sais! J'suis pas née d'la dernière cerise sur le cadeau... Monsieur Jean parle pas beaucoup, mais qu'est-ce qu'il est doué avec les mains!”
“Il ne t'a pas parlé des balustres de Louis Majorelle, celui qui a fait aussi la rampe du grand escalier?”
“Alors non. L'escalier on a pas eu le temps mais monsieur Jean a dit qu'on approfondira la prochaine fois”
“Et non plus comment la lumière inonde le grand hall?”
“Alors non. On a rien inondé, c'est vraiment du coutil cent pour cent polyester. J'y croyais pas avant d'le voir. Il m'a fait toucher la différence entre la camelotte et le bazar de luxe! ”
“Il t'a forcément vanté la vue panoramique, le deuxième endroit le plus visité de France et le...”
“Pour la vue panoramique, ça, monsieur Jean était vachement content mais après il a eu un coup de fil de sa femme - madame Jean je crois - alors on avait plus le goût au truc bisantin.”
“Donc tu n'as pas vraiment profité du spectacle?”
“Alors non. Passe que tu vois, monsieur Jean préférait que j'sois sur lui, rapport à sa vue panoramique à lui”
“Tu vas avoir besoin d'un coup de main pour ton rapport de stage?”
“Alors non. J'crois qu'je vais parler du grand sapin et des boules!”
“T'as raison, le sapin et les boules, c'est bien”
 
 
Vegas sur sarthe
 
18 décembre 2013 3 18 /12 /décembre /2013 22:46

 

Un nuage de poudre sur son visage, deux pschitt d’eau de parfum, un dernier coup de peigne dans une chevelure soignée. La veste en laine, l’écharpe, la rue, le métro…

La démarche un peu en crabe se veut assurée mais sans précipitation. Le parcours quasi journalier est familier.

Retour au grand jour sur le boulevard Hausmann. Les passants autour d’elle vont, viennent. Paris vit.

Arrêt. Inspiration, expiration. Doucement le cœur se calme.

 

Entrée dans les galeries Lafayette. Bonheur à chaque fois renouvelé.

Elle se faufile d’un rayon à l’autre, savoure, curieuse, la palette des couleurs, la variété des matières, les nouveautés misent en valeur… observe les acheteurs cosmopolites, admire la patience des vendeuses, se réjouit d’une musique, d’un dialogue happé ici ou là…

 

D’étage en étage, elle suit son rituel la menant à la librairie. Caresses discrètes aux livres ses amis fidèles, découverte des dernières parutions. Fatigue soudaine.

 

Une méringue ? Un Paris-Brest ? Non, un thé au jasmin accompagné d’un biscuit.

Lenteur, repos, chaleur. Le temps s’écoule, elle se sent bien.

 

17 heures ? Déjà ?

 

Un ultime regard vers le sapin en tenue de fête, un dernier frisson de joie en admirant encore et encore la belle coupole Art Nouveau.

 

La nuit s’est installée. Le métro est bondé.

 

Qui aura aperçu la silhouette de la vieille parisienne solitaire ?

 

 

Mony

 

18 décembre 2013 3 18 /12 /décembre /2013 18:29

 

Samovars, balalaïkas
Sous cette voûte enchantée,
Babouchkas, matriochkas
Autour du sapin étoilé,
Dansent la mazurka.
Venues célébrer
Depuis leurs lointaines datchas,
Cette coupole dorée.
Chants slaves, troïkas
A travers les steppes enneigées,
Zakouskis, vodkas
Des verres, on a lancé.
Et sur la Volga
Des traîneaux ont patiné,
Pour se rendre là-bas
Où mille feux sont allumés.

 

Jaclyn O'Léum

18 décembre 2013 3 18 /12 /décembre /2013 09:39

 

Allo, Manu ?!... T’es où, là ?... Dis, t’as pas vu la clé de voûte ?... Oui, il est deux heures du mat et alors ?... Je n’ai pas retrouvé cette p… de clé !... Oui, la clé pour serrer les grandes arches !... Ben oui, la spéciale !... Oui, celle avec les essieux hydrauliques, les ressorts à compression sphérique, les mortaises hélicoïdales et les accroches à géométrie variable !... Dix fois, j’ai fouillé l’atelier, cent fois, cet après-midi, j’ai regardé partout dans le camion et je ne l’ai retrouvée nulle part !... Ne me dis pas que tu l’as paumée !... On l’a fait venir de Finlande juste pour ces chantiers exceptionnels !... Elle vaut si cher qu’elle est en location !... ‘Tain, pour la paumer, faut le faire exprès !... On a le Panthéon à revisser la semaine prochaine !... Un chantier à quatre cent mille euros la journée !... Le patron va être furax !...

 

Dis, la coupole des Grandes Galeries ?... C’est toi qui as bossé dessus ?... Mais qu’est-ce que tu en as foutu ?!... Hé, déconne pas !... Une clé de vingt kilos, si elle tombe de cette hauteur, elle va s’écraser jusque dans une rame de métro, vingt mètres plus bas… Quoi ?...T’es sûr ?... Tu l’as oubliée là-haut ?... Comment on va faire ?... L’hélicoptère ?... T’es fou !... La grande échelle des pompiers ?... Mais il ne vont pas se déplacer s’il n’y a pas de fumée !... Mais non, on ne peut plus rien démonter, le magasin a installé un sapin géant juste dessous !... Quoi ?... Tu veux foutre le feu au sapin ?... T’es où, là ?...

C’est quand l’inauguration ?... Demain ?... C’est fanfare, ruban bleu blanc rouge, maire de Paris, ministres et compagnie ; ils ont même invité tous les patrons des grands magasins alentour… ‘Tain, on va faire des morts, c’est sûr… Mais comment t’as fait ton compte pour l’oublier, cette clé ?!... Une clé à molette, à pipe, alène, à douille, je veux bien, mais : la clé de voûte ?!...

 

Quoi ?... C’est à cause d’une nana qui bossait dans la galerie ?... C’est ça ?... Comment ?... T’as perdu la tête ?... Dans ses yeux, t’as cru inventer le ciel bleu ?... Mais c’est à cause de cette coupole mirifique !... Une fête dansait dans tes mains ?... Heureusement que tu n’as rien fait tomber… Tu veux fuir la planète pour la suivre ailleurs ?... Mais ça, c’est l’ivresse des cimes, Manu !... Quoi ?... C’est parce qu’elle t’a souri ?... T’aurais mieux fait de lui dédier un poème…

 

Il n’y a que toi pour croire encore au père Noël !... Tu donneras d’autres explications au patron ; c’est sûr, il va hurler en réclamant ta démission !... Comment on va faire ?... Avec Noël qui approche, on est dans la merde, mon pote !... Il fallait que tu tombes amoureux sur ce chantier !... Comment ?... Tu ne connais même pas son prénom ?...  Je t’imagine bien avec ton air de chien battu, tes gestes d’automate désespéré et tes énormes cernes sous les yeux…

C’est sûr, c’est pour cela que tu as réalisé cette coupole avec tant de génie, tant de délicatesse, tant de maestria. C’est vrai ; sur celle-là, tu as mis tout ton cœur, Manu. Dans chacun  des reflets du vitrail, on voit un de tes sentiments les plus talentueux, on voit tout ton travail. Dans chaque brillance, il y a tout ton Amour qui illumine la coupole ; dans chaque irisation, dans chaque détail, c’est une vraie merveille, Manu !... Même le patron a dit que tu avais réalisé un chef-d’œuvre !... Dis-moi, tu voulais vraiment l’éblouir, cette beauté ?!... T’as son adresse, au moins ?... Même pas ?... T’avais rendez-vous avec elle, ce soir ?... Quoi ?... c’est une fée ?... Mais c’est elle qui t’a émerveillé, Manu !... Elle t’a ligoté avec ses enluminures de magicienne !...

 

 

Mais t’es où, là ?... Dans la Galerie Marchande, à deux heures du mat ?... Mais qu’est-ce que tu fous, là-bas ?... Comment ?... Tu veux escalader le sapin ?... Tu vas grimper dans l’arbre jusqu’à l’étoile filante ?... Mais t’as encore dix mètres avant d’atteindre le plafond !... Mais qui va tenir ta lampe ?... Quoi ?... Tu vas te casser la gueule, Manu !... Pense aux épines, tu vas décrocher les boules et t’emmêler dans les guirlandes !... Quoi ?... L’Amour te donnera des ailes ?... T’as le courage de raconter encore des conneries, toi !... Tu vas te péter la gueule sur le carrelage !...

Attends-moi, Manu, j’arrive !... A deux, on trouvera bien une solution !... Mais non, ne dis pas que t’es bon à te pendre, que t’es bon à te foutre à l’eau !... Arrête avec tes conneries à la mords-moi le Brel  !... Tant qu’il y a de la vie, il y a de…

 

Quoi ?... Comment ?... A la lueur de ta torche, il y a un paquet au pied du sapin ?... C’est un cadeau ?... Allez, déconne pas Manu, je n’ai pas envie de rire, j’ai passé l’âge !...

Je cherche plutôt le moyen de nous en sortir !... Il nous faudrait une bonne corde de fakir, un grand tour de magie… Sur la pointe des branches, je te ferai la longue échelle et si c’est pas assez, ben, il nous restera quelques bonnes bières à écluser avant l’ouverture !…

 

Quoi ?... Comment ?... Il y a ton prénom sur un petit bristol accroché au cadeau ?!... C’est lourd ?... Mais tire sur le ruban, Manu, tire !... Y en a pas ?... Ben, ouvre, Manu, ouvre !... Derrière le carton, il y a un prénom et un numéro de téléphone ?... C’est quoi ?... C’est quoi ?... Raconte, Manu, raconte !... C’est la clé de voûte ?!... C’est ça ?... Mais arrête de chialer, je ne comprends rien à tous tes murmures !... Y a un mot accroché à l’outil ?... Avec ta tête en l’air, c’est elle qui a récupéré la clé que tu as oublié et qui l’a mise sous le sapin parce qu’elle savait que tu allais revenir, c’est ça ?... Oui ?...

Tu vois, Manu, quand je te dis que le père Noël n’existe pas…

 

 

Pascal.

 

17 décembre 2013 2 17 /12 /décembre /2013 20:09

 

- Alors les gars, il ne vous semble pas bizarre ce sapin conique pointu comme un suppositoire ? Je pense que personne ne s'en doute mais en fait c'est un… un …? un canon à vapeur !

- Un canon à vapeur ? je fais, d'un ton étonné, pour faire plaisir à Papa, bien que je sois sûre que c'est encore une de ses blagues vaseuses.

Jacky, lui, il s'en fout, il fait la gueule, il est furieux que les parents l'aient trainé ici alors qu'il avait prévu d'aller chez Tom pour  jouer au " vengeur des abimes"

- Eh oui, les gars (apparemment, depuis sept ans, il a pas encore capté que je suis une fille), comment voulez-vous qu'ils nettoient une coupole pareille, à vingt mètres de hauteur, s'ils n'envoient pas de la vapeur sous pression ?

Papa est un inventeur dans l'âme. Pas vraiment réalisateur, mais concepteur, designer, inventeur, comique et comptable. Le nouveau Léonard de Vinci, elle l'appelle, Maman.

En fait, si on peut se taper la discute, là maintenant au milieu de tous ces gens qui grouillent et transpirent, où on est venus attraper la grippe, c'est parce qu'on a réussi (un vrai miracle de Noël, dit maman) à tomber sur  trois tabourets libres dans le stand de démonstration de la télé sans écran. Et je suis sur les genoux de Papa.

Du coup Maman donne son avis.

- à mon avis, dit-elle, pour nettoyer la verrière, ils doivent employer des équipes d'Indiens.

- des vrais Indiens ? je fais, d'un ton étonné, pour faire plaisir à maman

- mais oui on a vu un reportage là-dessus, il parait que les Indiens n'ont pas le vertige, et de ce fait ils sont très demandés pour les travaux au-dessus du vide.

- des vrais Indiens avec leurs plumes ? je demande.

- C'est ça, oui, dit Papa, ils volètent gracieusement sous la coupole sur des trapèzes, en sifflant, comme Vanessa dans la pub Chanel.

Et Jackie se réveille :

- Hep, renard argenté, tu  passes la brosse ? Loup agile a fait tomber la sienne.

 

J'en ai marre de la foule et j'ai mal aux pieds, et si on ne part pas tout de suite  on va louper Princesse Cindy sur Gulli. Il faut que je pleure, ça marche toujours.

Alors je pense à l'année dernière, quand ILS M'ONT PERDUE chez Ikéa, et que j'ai passé vingt minutes dans une petite salle, derrière l'accueil, avec un énorme vigile qui, pour me remonter le moral, m'a raconté une histoire qu'il avait lue dans le journal, où des gens avaient volontairement abandonné leur gamin de cette façon-là.

Alors je pleure.

 

Emma

17 décembre 2013 2 17 /12 /décembre /2013 18:34


Les garçons me saoulent avec mes yeux. Surtout Maxime, Benjamin, et toute la clique de mes amoureux.

Maxime (c'est le plus grand, il est en 4ème et frime un peu parce qu'il a commencé le grec ancien) dit que j'ai les yeux d'Athéna, des yeux pers, glauques comme les feuilles des capucines, mais ce n'est pas vrai, mes yeux sont pairs et vairons, ce qui veut dire que je n'ai pas les deux yeux pareils, comme la fourrure d'un écureuil nordique.

A gauche, j'ai un œil de mouche, un  œil avec une myriade de facettes, comme un vitrail, qui me permet de zyeuter les garçons à 360 degrés et de voir la nuit toutes leurs couleurs. Du côté droit, mon  œil est une voûte céleste, la constellation de la Mouche y brille au sud. Pour affoler Benjamin, je m'amuse à souffler vers mon front pour faire s'envoler ma Chevelure de Bérénice.

Benjamin (c'est le plus jeune, mais je l'aime bien car c'est un poète) dit que mes yeux sont beaux comme les coupoles et les rosaces des galeries Lafayette, et que mes cils sont des sapins de Noël. N'importe quoi.

Les garçons me saoulent avec mes yeux. J'ai pas que d'beaux yeux, tu sais.


Bricabrac

17 décembre 2013 2 17 /12 /décembre /2013 08:15

 

On serait dans des profondeurs.

Marines.

On serait plancton; balloté deçà delà.

Courants.

On se tournerait vers Sa lumière.

Divin Poulpe.

Ses dix bras protecteurs nous abriteraient.

Coupole.


Nounedeb

16 décembre 2013 1 16 /12 /décembre /2013 20:45

 

Fameux, ce petit vin chaud à l’entrée de la galerie marchande, un poil brûlant, peut-être…

 

« Ôooooo, c’est beau… »

 

Mon gamin se perd dans la contemplation de la voûte céleste du grand magasin. Bouche bée, ses yeux émerveillés cherchent quelques ancrages pour se stabiliser d’un étourdissement probant. Je peux voir, dans ses pupilles émerveillées, tous les reflets brillants de l’immense coupole. Il n’est qu’éblouissement, aveuglement, extase… Aspiré, absorbé, possédé, plus que spectateur, il s’est complètement intégré dans l’œuvre du vitrail ; tellement enthousiaste, il ignore tout des magasins alentour débordant de leurs jouets de Noël.

Il n’a pas encore dans la bouche tous ces superlatifs théâtraux, ceux qu’on rameute en cavalcades de frissons généreux quand les sens se retrouvent ensemble, à l’unisson, à la même contemplation. Mais, à sa manière, il administre son vertige au tempo exalté de cette hypnotisation flagrante. Il garde prisonnier son souffle comme si le fait de respirer pouvait modifier défavorablement son panorama, comme si son rêve allait se déliter dans une autre image moins époustouflante que celle dans laquelle il se meut avec tant d’emportement…

 

Oui, vraiment fameux, ce petit pinard…

 

Tout à coup, mon gamin s’est mis à tourner sur lui-même, comme une toupie emballée, en regardant ce ciel de Lumières !... Ses bras se sont élevés, son écharpe s’est déroulée, son manteau s’est écarté, mus par cette mystérieuse force centrifuge !... S’il était sur ses deux pieds, là, sur le carrelage de la galerie marchande, ses sensations se sont envolées au milieu des mille éclats de lumière si attirants !... Absorbé, il rit benoîtement, il applaudit véhémentement, il chante bruyamment !... Sa main est flasque, sa peau est froide, ses regards sont absents : mon fils n’est plus là… Libre alouette, il vole de ci, de là, à l’aventure extraordinaire des effets du miroir ensorcelant… Enfin, il s’est perché à la cime de l’immense sapin de Noël…  

 

Faut dire, qu’ils n’ont pas lésiné sur la grandiloquence de l’arbre !... Au moins, dix mètres !... Sont allés le chercher au Liban, ce cèdre géant ?!...

 

« Attention, mon gamin, tu vas te piquer avec les épines !... »

 

Il discute avec l’Etoile maintenant !... Pourtant, ce n’est pas un bavard, mon Lucien. Quand je le prends, pour le week-end, il n’a jamais rien à me dire. Même, spontanément, il ne vient pas dans mes bras quand j’ouvre les miens. Je crois qu’il se force…

 

Y’a du Cognac dans ce vin chaud, de la cannelle et un clou de girofle, c’est sûr…. Faudra que j’y retourne pour confirmer…

 

« Mais appelez les pompiers, rendez-moi mon gamin !... Dis, tu vas redescendre ?... Faut encore que tu te fasses remarquer !... Regarde la foule qui s’agglutine comme si on était l’attraction du moment !... »

 

« Papa, papa !... C’est l’habit de Lumière du père Noël !... Cent fées émérites ont cousu, au fil d’or, le patchwork de son fabuleux manteau !... Regarde !... Regarde !... Chacun des détails apposés au vêtement est un sentiment diffus, une obsécration fougueuse, une imposition chaleureuse, un bas-relief d’altitude !... »

 

Mais voilà qu’il me parle comme un adulte, ce gamin, avec des mots que je ne comprends même pas !... Il est comme moi, ce môme, il collectionne les zéros à l’école !... Il me ressemble tellement qu’il n’a pas d’avenir : c’est sa mère qui le dit toujours !...

 

« Descends, p’tit con !... Je vais t’en foutre une, moi, une putain de torgnole et qu’avec des mots choisis !... C’est pas une étoile que tu vas voir mais trente-six chandelles !... Et ne me prends pas pour un con !... L’habit du père Noël, tout le monde le sait : c’est rouge… »

 

En vin chaud, c’est meilleur… mais pas trop, autrement, ça perd ses degrés...

 

« Mais appelez les bûcherons !... Amenez les tronçonneuses, les meilleures haches de la région !... La grande échelle !... Bouge pas, mon petit, on va venir te délivrer !... Accroche-toi bien à l’Etoile, on arrive !... Si tu te casses une jambe, tu vas à l’hôpital et, moi, je suis bon pour retourner au tribunal !... »

 

Mais non, il s’en fout !...  Il reste planté là-haut, juste pour m’emmerder !...

 

« Hé, tu réclames tes cadeaux au père Noël ?... Il ne t’entend pas, je n’ai rien dans mon porte-monnaie !...  »

 

« Papa ?!... Papa ?!... Je danse au milieu des Lumières, je frôle les guirlandes, je me mêle aux enluminures, je pavoise dans les truculences !... Regarde, des myriades d’étincelles m’accompagnent !...  »

 

« Allez Lulu, ne fais pas ton obtus !... »

 

Ils vont fermer la buvette et je ne pourrai même pas faire le plein de rêves pour décorer la soirée… Un euro, le godet, c’est ça le vrai cadeau de Noël… Moi, je penche pour du Cabernet d’Anjou… D’en joues… rouges ?... En joue, feu !... Ha, ha… Tout à coup, j’ai senti qu’on tirait doucement sur ma main…

 

« Papa ?... Papa ?... On rentre ?... J’ai froid… Allez, arrête de te répandre, arrête de gueuler, arrête avec tes visions capiteuses, on est la risée du magasin… Allez, pose ton gobelet de vin chaud… C’est comme ça à chaque fois quand arrive Noël ; allez, ramène-moi chez maman avant que ces vigiles zélés nous embarquent encore au poste… Mais non, ce n’est pas les bûcherons…  »

 

 

Pascal.

 

16 décembre 2013 1 16 /12 /décembre /2013 11:41

 

Sous La Coupole.... il y a cette femme qui court et s’essouffle pour acquérir les derniers cadeaux de noël. Mais chez elle, autour d’elle il n’’y a personne qui attendra ces cadeaux là, ils iront comme les années précédentes finir leur vie dans un placard … elle est seule, aussi seule que la mendiante de l’Est assise devant l’entrée de ce grand magasin la seule chose qui les différencie c’est les tunes
 
Sous La Coupole.... il y a ces vendeuses exténuées, qui voudraient bien fêter Noel en famille, mais doivent attendre que le magasin descendent  ses grilles scintillantes et parées de mille feux …et les petits, à la maison, attendront eux aussi, pour recevoir les cadeaux..
 
Sous La Coupole.... il a Dorothée qui cherche une lingerie sexy et élégante pour ses grisants moments sensuels 
 
Sous La Coupole.... il y a également tous ces objets électroniques, attendus, tentants, alléchants, fabriqués ailleurs et qui font dérailler le PIB
 
Sous La Coupole.... il y a un rayon  rempli de livres qui donneront l’envie de s’évader dans des ailleurs meilleurs
 
Sous La Coupole.... il y a tout une fourmilière en vie, avec ou sans passion, mais qui vit, s’accroche contre vents et marée
 
Sous La Coupole.... la vie bat son plein, la vie est là, la vie que nous aimons malgré tout  parcourir jusqu’au bout
 
Et là haut,
 
Au dessus de la coupole, bien haut, il y a le Père Noel qui fait si bien rêver
 
 
Jak
15 décembre 2013 7 15 /12 /décembre /2013 06:10
 
Sous la coupole centenaire
j'ai croisé trente pères Noël
ils mon donner des dictionère
que j'é foutu a la poubèle
 
Dessous la verrière Art Nouveau
j'ai braqué le rayon tablettes
je m'étais servi au niveau
Kalachnikov et mitraillettes
 
Et sous les vitraux byzantins
inscrit “Par ici la monnaie”
y'avait un tripot clandestin
rempli de caissiers polonais
 
Dans ce monument historique
les employés, les actionnaires
m'ont trouvé très antipathique
sous leur coupole centenaire
 
 
Vegas sur sarthe
 
15 décembre 2013 7 15 /12 /décembre /2013 06:06

 

Cela fait trois jours que je suis ici, au pied du sapin du centre commercial. Le toit est magnifique, admirez cette voûte. Un petit quelque chose attise ma curiosité, là-haut, au sommet de ce grand truc vert. Ça brille. Je trouve ça joli ! Mais on ne me laisse pas aller voir de plus près.
L'endroit regorge de monde mais mes frères semblent eux aussi apprécier le spectacle. C'est la première fois qu'on voit une telle chose. Toute cette agitation est un peu stressante. J'aimerais savoir où est passée maman, elle seule sait me rassurer lorsque je commence à paniquer.
Mon collier, bien que joliement assorti à ma robe, me démange. Allez savoir pourquoi, depuis peu, la tenue chique est requise. Je me demande ce qu'en penserait papa. Il en a de la chance, lui, on ne l'a pas obligé à venir. La seule qui nous accompagne, c'est la dame que maman aime bien. Je crois qu'elle est plus là pour nous surveiller qu'autre chose. Il faut dire que quand on s'y met tous ensemble, on lui donne du fil à retordre. Elle ne permet aucune dispersion, je crois que l'union fait la force, surtout dans un périmètre bien limité !
Mais l'union n'est qu'une force éphémère. Une jeune fille se dirige droit vers nous et est immédiatement séduite par le noeud papillon d'un de mes frères. Elle l'isole, le prend dans ses bras. Finalement, elle ne nous le rend pas, elle crit et la grande dame à ses côtés s'adresse à notre nourrice dans un langage que je ne comprend pas.
Maman, maman, celui-là est vraiment trop mignon. Dis, on peut le prendre ? S'il te plaît ! Dis oui, dis oui !
Bonsoir Madame, combien pour ce chiot ?
Notre gardienne a bredouillé quelque chose et la petite fille est partie avec lui. Je n'ai rien pu faire.

C'est sous ce truc vert, dans ce drôle de batîment, au coeur de ce carton que notre famille s'est déchirée et que nous sommes devenus des cadeaux de Noël.

Le bonheur des uns fait donc bien le malheur des autres.


 

Tilancia

14 décembre 2013 6 14 /12 /décembre /2013 16:32

 

Je pourrais vous raconter le magasin de jouets du bout de la rue Jacquemart ; je pourrais vous expliquer chacune des babioles exposées dans la devanture ; je pourrais vous détailler mes languissements intéressés, mes caprices de lettre au père Noël et la main de maman tirant sur ma menotte pour me décoller de la béatitude de l’endroit. Une autre fois peut-être, une autre fois…

 

Mais j’étais scotché dans la vitre, moi !... Même mon reflet intimidé restait en extase dans la lumière bariolée du magasin !... Rien que d’en parler, tenez, les souvenirs m’assaillent, quelques larmes heureuses se perlent en liesse sous mes paupières rêveuses et ma main tremble de raconter ici ce passé enchanteur !...

 

Maman pouvait bien faire toutes ses courses dans la rue, je ne bougeais plus d’un duvet !... Mais ici, sur ce trottoir froid, c’était ma halte-garderie, à moi !... L’écharpe bien nouée autour du cou, les moufles attachées sur mes mains gelées et l’haleine vaporeuse, je surveillais toute la vitrine !... C’est à cette époque que j’ai commencé à penser que je n’avais pas assez de deux yeux pour tout admirer ; je tournais la tête dans tous les sens même si ma cagoule me cachait le panorama du magasin. Il y avait tant à voir…

Ici, des trains électriques se croisant avec tous leurs feux allumés !... Des locomotives laissaient fumer leurs cheminées et des voyageurs aux fenêtres semblaient saluer la gare traversée. Quand ils se cachaient dans les enfilades de tunnels, je croyais toujours qu’ils s’en allaient chez le père Noël. Leur invisibilité rendait la magie de l’instant encore plus grande !...

Là, la panoplie de Davy Crockett et tout son attirail pour survivre dans la forêt !... Il avait une coiffure en peau de raton laveur et cela m’impressionnait plus que tout. Je voulais tant l’apprivoiser… Sa ceinture était large, son couteau dormait dans un étui tressé et les franges de son habit couraient en liberté dans l’emballage transparent…

Moi, je battais la semelle !... J’avais des frissons de voyage, des curiosités de nouveaux panoramas, des sensations d’explorateur !...

 

Ici, un alignement de petites voitures !... Je cherchais vainement celle de mon papa parce que mes regards s’enfuyaient toujours vers un ailleurs plus étincelant !... Là !... Une armée de soldats en reconquête de victoire !... Fallait voir tous leurs rangs organisés, les canons rutilants et les chevaux les tractant !... Ils semblaient tous investis dans l’effort comme si la maquette était une réalité d’Histoire. Je pouvais entendre leurs chansons de succès, leurs cris de conquérants ; leur immobilisme conférait à l’ensemble une étrange campagne de fleurs aux fusils… Punaisés, des avions de modèles réduits voltigeaient dans un ciel de féerie au bout de leurs ficelles transparentes.

 

La nuit précoce réfléchissait les décorations suspendues de la rue dans l’impressionnant  kaléidoscope de la vitrine. C’était alors une apothéose de lumières extraordinaires ; les guirlandes multicolores s’allongeaient, les ampoules clignotantes étaient mes points de ralliement, les bougies factices laissaient danser leurs flammes tumultueuses et tous les jouets s’animaient d’une vraie fantasia !... Mais c’était l’antre du père Noël !... C’était son magasin pour faciliter ma commande au bout de ma plume exaltée !...

Parfois, un gamin se collait à côté de moi contre la glace ; à la lumière de ses yeux émerveillés, il voulait voler tous mes jouets… J’écartais les coudes, je prenais toute la place, j’avais le regard noir… Parfois encore, le patron du magasin extirpait un jouet de mes contemplations ; sur la pointe des pieds, il investissait sa vitrine et je devenais orphelin de ce cadeau disparu…

Ici, des patins à roulettes !... Ceux qu’on n’enlève jamais de ses pieds !... Ha, oui, j’aurais pu dormir avec pour vivre mes rêves en vitesse et me retrouver dans la réalité de la journée du lendemain plus vite encore !... Là, un accordéon déplié !... J’entendais distinctement toutes ses notes essoufflées !... C’était l’hymne glorieux de l’armée à la parade !... C’était le refrain dans la bouche de la poupée, celle qui me suivait des yeux à travers mes indiscrétions de petit voyeur !... C’était la musique du feuilleton de Davy Crockett !... C’était la chanson du papa Noël !...

Un instant, la buée de mes interprétations forcenées cachait mes regards admiratifs mais j’essuyais la vitrine comme un essuie-glace frénétique pour ne rien perdre de tous ces trésors inestimables. J’étais frigorifié, et alors ?... Je savais faire des feux comme Davy Crockett, voyager dans ces trains jusqu’aux frontières magiques, là où le soleil ne s’endort jamais, commander ces armées flamboyantes à des victoires certaines, piloter ces avions jusqu’aux étoiles, conduire ces voitures de sport pour rejoindre le fameux garage à manivelle !... Je voulais tant enlacer tous ces gros nounours, les amadouer avec tous mes baisers cajoleurs ; dans mes mains glacées, je sentais pourtant la douceur de leur velours, la chaleur de leurs bras ; je voulais étreindre leur constante affection, j’avais tant de secrets à partager.

 

Maman me récupérait au bout de mes rêves ; la neige de décembre se médaillait sur mon manteau, les bruits des alentours s’étouffaient dans une sourdine bienheureuse et, le nez gelé, les mains tassées dans mes poches, le souffle exhalé de vapeur de locomotive, je courais sur le trottoir comme un petit singe remonté à la clé magique de mes espérances de Noël…  

 

Oui, j’aurais pu vous parler du magasin de jouets, celui avec tous ses artifices, celui du bout de la rue Jacquemart, une autre fois peut-être, une autre fois…

 

 

Pascal.

 

14 décembre 2013 6 14 /12 /décembre /2013 16:21

 

Pour les fêtes de fin d'année, un voyage dans la capitale était offert par une association aux enfants touchés par la pauvreté. Paul, dont les parents étaient chomeurs, faisait partie des bénéficiaires.

 

Il s'est levé tôt ce jour là, tout excité de voir en vrai (à la télévision cela ne compte pas) la tour Eifel, la Seine et Notre-Dame. Il a pris avec ses camarades, un beau car. Ils ont chanté, ri tout au long du voyage, c'est que pour des enfants de sept ans c'est tout une aventure à vivre et à se souvenir.

 
Ce sont les étoiles plein les yeux qu'ils sont arrivés. Dans les rues, des illuminations plus belles les unes que les autres.
 
 - Madame où est la tour Eiffel ? demanda Paul à une accompagnatrice.
 
 - On va passer à côté tout à l'heure, pour l'instant, on va voir les magasins.
 
 - Ah ! fait-il déçu.
 
C'est que les magasins, Paul connait, il y en a dans son village alors pourquoi venir à Paris ? Encore des idées idiotes des adultes se dit-il. Il a suivi le groupe bien gentiment sans vraiment faire attention aux vitrines décorées. Il est entré en silence dans un "château" tout brillant avec plein de lumières, un sapin qui montait presque jusqu'au plafond scintillait de mille feux.
 
 - C'est beau, dit un enfant près de lui.
 
 - Ouais ! répond Paul, mais le ciel plein d'étoiles me plaît mieux.
 
 - Dans le ciel, il n'y a pas toutes les belles choses : des habits tout neufs, des jouets, des...
 
 - M'en fous, moi je veux voir la tour et la Seine et … Notre-Dame, crie Paul, buté.
 
 - Les enfants, un peu de calme et écoutez la belle musique de Noël.
 
 - Pff ! C'est pas de la musique ça, c'est du bruit, c'est moche et puis j'ai chaud. Dites Madame, je peux sortir ?
 
 - Attends les autres, répond la rombière dégoûtée par le manque de gratitude de Paul.
 
La tête basse, Paul n'a plus rien dit, il a mangé avec tout le monde dans un parc puis il est remonté dans le car qui est reparti pour son village. Certes, il a passé à coté de la Tour mais sans s'arrêter. Lui qui rêvait tant de faire une prière pour ses parents sur la tour ( tout en haut, c'est plus près des étoiles, elles l'auraient mieux entendu) Il a aperçu la Seine mais rien de Notre-Dame.

Lorsque Paul s'est couché ce soir là, il avait plein de larmes dans ses yeux. C'est sûr se dit-il, mes parents n'auront jamais de travail puisque personne ne m'a entendu.
 
 
Aimela
 
Pour les fêtes de fin d'année, un voyage dans la capitale était offert par une association aux enfants touchés par la pauvreté. Paul, dont les parents étaient chomeurs faisait partie des bénéficiaires.

 
Il s'est levé tôt ce jour là, tout exité de voir en vrai( à la télévision cela ne compte pas) la tour Effel, la Seine et Notre Dame . Il a pris avec ses camarades, un beau car . Ils ont chanté, ri tout au long du voyage, c'est que pour des enfants de sept ans c'est tout une aventure à vivre et à se souvenir.
 
 
Ce sont les étoiles plein les yeux qu'ils sont arrivés . Dans les rues, des illuminations plus belles les unes que les autres.
 
 - Madame où est la tour Effel ? Demanda Paul à une accompagnatrice.
 
 - On va passer à côté tout à l'heure, pour l'instant, on va voir les magasins.
 
 - Ah ! fait -il déçu.
 
C'est que les magasins, Paul connait, il y en a dans son village alors pourquoi venir à Paris ? Encore des idées idiotes des adultes se dit-il. Il a suivi le groupe bien gentiment sans vraiment faire attention aux vitrines décorées . Il est entré en silence dans un "château" tout brillant avec plein de lumières, un sapin qui montait presque jusqu'au plafond scintillait de mille feux.
 
 - C'est beau dit un enfant près de lui .
 
 - Ouais répond Paul mais le ciel plein d'étoiles me plaît mieux.
 
 - Dans le ciel, il n'y a pas toutes les belles choses : des habits tous neufs, des jouets, des...
 
 - M'en fous, moi je veux voir la tour et la Seine et … Notre-Dame crie Paul, buté.
 
 - Les enfants, un peu de calme et écoutez la belle musique de Noël.
 
 - Pff ! C'est pas de la musique ça, c'est du bruit, c'est moche et puis j'ai chaud . Dites Madame, je peux sortir ?
 
 - Attends les autres, répond la rombière dégoûtée par le manque de gratitude de Paul.
 
La tête basse, Paul n'a plus rien dit, il a mangé avec tout le monde dans un parc puis il est remonté dans le car qui est reparti pour son village. Certes, il a passé à coté de la Tour mais sans s'arrêter.Lui qui révait tant de faire une prière pour ses parents sur la tour( tout en haut, c'est plus près des étoiles, Elles l'auraient mieux entendu). Il a aperçu la Seine mais rien de Notre-Dame .

 
Lorsque Paul s'est couché ce soir là, il avait plein de larmes dans ses yeux. C'est sûr ce dit-il, mes parents n'auront jamais de travail puisque personne ne m'a entendu.
 
aimela
 
14 décembre 2013 6 14 /12 /décembre /2013 13:38

 

Temple au luxe dédié
Rêvez petites gens, rêvez
Sous ce dôme mythique à paillettes
Des Galeries Lafayette 
Ne parlons pas chiffres, non...
Ils donneraient le tournis crénom
Au p'tit commerce de proximité
Dans le quotidien banal affairé
Celui du panier de la ménagère
En mode vie ordinaire...
Deux mondes en un
Notre train-train
A nous, billet de seconde classe
Souvent la chasse
Aux bonnes affaires
Loin des lumières
Du Boulevard Haussmann et ses chinois
Nouveaux riches attirés ma foi
Par le savoir-faire à la française
Boutiques bien aise
De prendre leur devise
Claquée à leur guise...

Ce soir, songeuse,
Suis-là sous un réverbère
A regarder l'astre de nuit
Lune de tout démunie
Que pense t-elle de la terre
Envieuse ou moqueuse... 


 

jill bill 
 

12 décembre 2013 4 12 /12 /décembre /2013 20:09

          

             On est arrivés avec l'ambulance, sirènes hurlantes et gyrophare, le chauffeur cherchait une voie pour poser la perf, finalement on a enfilé l'aorte à toute allure, pas de caillot à cette heure-là. On a bien remarqué les tags au passage, à cause du tabac, de l'alcool et du stress, mais il n'y avait pas encore de rétrécissement, je me fis juste la réflexion qu'il faudrait peut-être poser des stents, on verrait à la coronarographie.

 

La police était déjà là, le panier à salade barrant l'escalier des Trois-Frères, et coursait les marchands de tue-l'amour à la sauvette qui s'installent toujours au coin de la rue Drevet.  Mais abandonnant leurs éventaires de chaussettes trouées, caleçons à l'élastique distendu et chemises de nuit déguenillées, ils avaient filé depuis longtemps vers Abbesses ou la place du Tertre, là où se tiennent à longueur de journée les radiologues qui tirent le portrait des touristes,.

 

Le cœur c'est une urgence vitale, je me rappellerai toujours le chef de clinique, pendant mon internat en cardiologie, qui appelait ça la Basilique du Sacré-Cœur, alors on avait foncé dès qu'on nous avait signalé la lettre de rupture, et le plateau de soins intensifs s'était mis en alerte, tandis que sur la terrasse les pales de l'hélicoptère commençaient à tourner. Mais sur place on a juste trouvé deux glandus, enfin je crois car je n'ai pas choisi l'endocrinologie comme spécialité.

 

Ils nous ont dit que tout allait bien, sauf qu'ils étaient en butte, comme souvent à Montmartre, aux tracas de la vie quotidienne, la difficulté de trouver du travail et un logement. Justement ils étaient au téléphone, répondant à des annonces pour des studios minuscules avec une  lucarne comme seule ouverture ou des CDD mal payés renouvelables à vie. Ils avaient des téléphones cellulaires, mais à quoi bon les porter au laboratoire d'histologie, qu'est-ce qu'on aurait vu de plus au microscope. Comme j'avais mon stéthoscope autour du cou, j'ai quand même pris le pouls des puces de leurs cartes SIM, je n'ai trouvé aucune anomalie et elles respiraient normalement.

 

Pour la lettre de rupture qu'on avait reçue, ils ne voyaient pas, car en amour tout baignait, pareil pour l'eau fraîche, peut-être une farce du chat noir ou du lapin agile qui habitent le quartier depuis la Commune de Paris. Fausse alerte. Alors on s'est arraché par la veine cave, on en a profité pour boire une pinte de vin de la rue Saint-Vincent, dont on a rapporté une bouteille à partager avec les néphrologues pendant les nuits de garde, ils en font toujours une grande consommation car ils s'en servent comme diurétique.

 

Bricabrac

11 décembre 2013 3 11 /12 /décembre /2013 10:08

 

          Pléthoriques, ils salopent les murs des cités avec leurs prétentions ubuesques soi-disant esthétiques. Ils ont des initiatives malheureuses sans couleurs impressionnantes que le blanc cassé, l’aluminium terne, l’or décati étalé ou le rouge saignant en couches épaisses peinturlurées sur leurs bas-reliefs incertains.

Ils ont des grandeurs boutonneuses qu’ils expriment en décorations nauséabondes, des sujets de réflexions picturales floues et des envolées badigeonneuses au lyrisme équivoque. Ils bombent les murs, avec leurs excrémenteux dessins décolorés, en mal d’existence évident. On en devine même le grave symptôme cérébral qu’on ne pourrait pas soigner avec une simple carte vitale.

D’autorité, engagés, ils signent leurs méfaits barbouillés avec d’autres intrigantes arabesques dégoulinantes, d’autres initiales grossièrement improbables, d’autres fluctuations pittoresques puisées au fond de leurs petits cerveaux embrouillés.

Ils boursouflent le support contrit de surexpositions salissantes, de bruyantes bambochades bariolées et d’invitations diurnes aux délires paranoïaques. Ils affichent, ils placardent, ils salissent. Ils se pressent aux murs pour exprimer leurs lamentations de quartier avec le mal de vivre enfermé dans leurs aérosols, comme des mauvais génies de cauchemar, sans nul pouvoir que celui de cochonner outrageusement l’environnement.

 

Ils s’insurgent haut et fort, ces prisonniers des banlieues, en rebelles dessinateurs approximatifs et ils peignent la grande tristesse ambiante, le cloisonnement infernal avec des couleurs enfermées, plus sombres encore. Bardées de bombes, ils explosent le quartier gris avec leurs empreintes malpropres à chaque coin de carrefour comme s’ils en étaient les maîtres absolus de par les stigmates imposés à l’entourage.

Par bravade, par dérision, par jeu, par insoumission ou par lassitude excentrique, ils s’exposent lamentablement aux quelques quidams inquiets accélérant, inconsciemment ou par instinct de survie, leur balade promeneuse.

Chaque école bariolée de quartier a ses signes cabalistiques de reconnaissance picturale, ses apôtres dégénérés à l’accoutumance caricaturale, ses couleurs de prédilection en bandoulière d’imagination coincée. Ils rivalisent, ces piètres vandales, d’audace laquée pour affirmer leurs peintures de guerre et les limites de leurs frontières. Ils suggèrent d’autres illuminations mortuaires en cortège effrayant de mornes farandoles étalées sur les farouches façades des usines fermées.

Comme des loups affamés, ils délimitent le périmètre de leur territoire malsain en pissant contre les murs leurs olfactives tendances bestiales, en miroitantes brillances éphémères, aux teintes sanglantes.

Qu’y a-t-il de plus démoralisant que de subir, de plein fouet, cette grandiloquente décoration dégradante au hasard d’un feu rouge un peu trop long ? Qui a l’apanage de l’habitué blasé pour supporter hypocritement ces tapisseries grotesques inondant captieusement  nos villes et nos quartiers ? Qui peut prévaloir dans cet échantillonnage ridicule, jeté à nos regards inquiets, un quelconque talent à l’artiste en herbe à cinq feuilles ?...

Ils frisent le sacrilège éhonté avec une noblesse d’Art qu’ils n’ont pas. Pourtant, c’est devenu banal à nos yeux accoutumés... Je voudrais bien leur accorder quelques circonstances atténuantes mais je me heurte à mon âme cartésienne. Ces farandoles peinturlurées d’inextricables ornements hermétiques pourraient être des timides tentatives de reconnaissance au monde. Ces immenses processions placardées, unanimes, animées d’humains inappropriés et débordés par les incessants tumultes modernes, sont leurs signes intimes extérieurs de grande détresse.

Ces longues fanfaronnades désespérées, esquissées brutalement dans l’ombre de la nuit apitoyée, sont des puériles prières d’existence perturbée, des douloureuses exhortations d’embellissement chaotique au sésame discret de leurs expéditions nuiteuses, des déploiements d’étalages barbituriques conciliant avantageusement l’art rupestre à la contemporanéité galopante, liés à l’enfermement de leur condition d’exilés sans avenir.

 

Je pourrais écouter la partition nébuleuse des notes précipitées contre leurs murs et me laisser embarquer par leurs chansons de sirènes exotiques. Chaque couleur a sa vibration propre, chaque emmêlement nuancé est un accord, chaque incartade bombée est une altercation verticale secouant la partition murale de troubles émois, un tempo rythmé d’incantations brutales, un dépliant infini de retable.

Ils étalent leur talent provisoire et jetable comme des chefs-d’œuvre regrettables avec des insolences écolières sans maître et sans cartable. Les couleurs sont à la Nature ce que l’anonymat est à la rature. Alors, ils osent d’autres révolutions imaginaires, en illusoires prescriptions salutaires, d’autres fioritures agencées dans leur tourmente déjantée, d’autres allusions de pochoirs aux allures incantatoires, d’autres incohérents coups de pinceaux aux sprays débordants d’incontrôlés soubresauts.

Abandonnés, perdus, seuls, sans repères véritables que les étoiles de la nuit pour éclairer leurs fresques hétéroclites et interdites, ils décorent, frénétiques, leurs garde-fous de graffitis pour ne pas basculer dans la folie. Ils fondent un feu d’artifice de fanfreluches fumigènes à la bombe amorcée de leurs émotions indigènes. Ils éclatent la nuit en de rocambolesques élucubrations inscrites aux courants de leurs imaginations bruyantes.

 

Entendez-vous les couleurs assourdissantes se fomenter en hymnes indescriptibles ?... Voyez-vous, contre ces murs, l’harmonie détaillée des impressions tamisées en tablatures imperceptibles ?...

 

Pascal.

 

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