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26 septembre 2014 5 26 /09 /septembre /2014 15:55

 

Le long de la rue des indulgents, une journée de début d'automne, mi-septembre peut-être.
1 000 détails et plus encore faisant de cette journée une journée particulière, rendant chaque journée unique.
Tous les ans ils s'installent en kiosques et vendent ce qu'ils appellent peinture, et que d'autres appellent "art".
 
Des paysages, des couleurs mal posées sur leurs pauvres toiles.
Toujours toutes moches ces toiles. Au mieux ils délaissent les paysages et s'essaie à de la vraie peinture.
Et alors l'on comprend pourquoi ils le font rarement.
 
En paysages ils ont acquis des techniques pour que l’œil s'habitue, mais quand ils peignent des bâtiments ou qu'ils font des portraits cela me fait rire de voir leur résultat dont ils sont fier, tableaux médiocres et au mieux fade.
 
Et pourtant, ce jour là, j'ai vu un tableau qui m'a plu. 60€, le moins cher de tous, le plus singulier, le plus intéressant, le plus agréable, le plus significatif.
 
Basé sur un film que j'avais justement revu récemment, et que j'avais beaucoup apprécié, un film rendant flou la réalité,l'identité, la mémoire, la volonté et les remettant en cause.
 
Ce tableau représentait Bob Arctor, perdu dans un monde qui se joue de lui, qui le dupe de partout. Qui observe qui, le passant observe le tableau ou le contraire est-il aussi vrai? Le style graphique renforçant ce sentiment constant d'équilibre perdu à jamais.
 
 
***
 
Tous différents, les hommes, les tableaux.
Tous bons set mauvais à la fois. Tous des mensonges et des vérités.
Personne n'a de place précise ou attitrée, on en prend une, on la fait sienne, se l'approprie, parce qu'on en a envie, parce qu'on en a besoin.
Parce que l'on nous a appris que l'on devait en avoir envie, que l'on devait en avoir besoin.
 
"Je suis réel" disent tous ces tableaux, portant sois-disant un message.
"Je suis réel" disent tous ces hommes, cherchant sois-disant la vérité quelque part, peut-être dans un des ces tableaux, peut-être dans un peu tous.
 
***
 
"Qui somme-nous vraiment?
Identité. Relations. Mélanges. Mensonges.
Qui sommes-nous? Qui suis-je?
Derrière cette image que je donne de moi,
Derrière beaucoup de mensonges.
Qui sommes-nous? Qui suis-je?"
 
"La peinture est une poésie silencieuse et la poésie une peinture qui parle." Simonide de Céos.
 
***
 
"Ej xuev ertê not trop ehcatta'd
Dnauq ut se eudrep
Euq tuot et elbmes rema
Te euq tuot et esselb."
 
"La peinture fait obstacle à la vision pour mieux capter l'invisible." Georges Perros.
 
 
Kevin
25 septembre 2014 4 25 /09 /septembre /2014 12:18

 

“Mon chéri... te souviens-tu de ce joli tableau que tu m'avais acheté sur les quais à Paris?”
“Euh... non”
“Mais si, enfin! C'était à l'automne 2012, j'avais craqué pour une aquarelle des tours de Notre-Dame... même que tu disais que - perspective ou pas perspective - les deux tours n'étaient pas de la même hauteur!”
“Tu veux dire qu'il n'y avait qu'une seule tour et qu'elle penchait sur tous les tableaux!”
“Mais non! Ca, c'est les tableaux à Pise en 2008!”
“A Pise? On n'a jamais fichu les pieds à Pise”
“Ouais? A Venise non plus d'ailleurs, en passant. Bref, tu ne peux pas avoir oublié ce peintre... je trouvais qu'il ressemblait à Léo Ferré avec ses longs cheveux gris et son air de chien battu”
“à Ferra, tu veux dire à Léon Ferra, le sculpteur”
“Quel Léon Ferra? Rappelle toi on était sur les quais, là où se tiennent tous ces bouquinistes!”
“Ma chère, on dit bouquineurs, pas bouquinistes... pour la même raison qu'on dit lecteurs et pas lectistes”
“Je t'assure qu'on dit bouquinistes! Et même que ce jour là, tu chinais une estampe ou je ne sais quel vieux machin pour tes collections”
“Non, mes vieux machins comme tu dis si bien, je les déniche dans des échoppes spécialisées au lieu de les chiner chez les bouquinistes”
“Ah tu reconnais qu'on dit bouquinistes!”
“Non, j'ai dit bouquinistes pour clore le déférent”
“On ne dit pas déférent mais différent, mon chéri... différent!”
“Je ne vois pas où est la déférence, en tout cas on n'est pas allés sur les quais à Paris”
“Mais enfin tu te souviens au moins que la Seine passe à Paris?”
“Je ne vois pas où tu veux en venir! Et puis s'il fallait que je sois allé partout où passe la Seine...”
“Et bien à Paris les rives de la Seine sont bordées de quais!”
“Je sais ça, Madame... bien qu'il n'y ait pas des quais qu'en bord de Seine”
“Monsieur a décidé de chipoter! Toujours est-il qu'à Paris les rives de la Seine sont faites de quais de Seine et que sur les quais de Seine il y a des vendeurs de livres et de souvenirs qui ont ces drôles de boîtes en guise d'étal et qui...”
“Tu mélanges tout, les boîtes c'est à Montmartre!”
“A Montmartre? Mais tu n'as jamais voulu monter à Montmartre!”
“Ah parce qu'à Montmartre, ça monte? C'est nouveau”
“Oui Môssieur! Tu crois qu'on se serait fait chier à installer un funiculaire si ça montait pas?”
“D'abord on ne dit pas chier ni funiculaire non plus, ça c'était avant... plus académiquement on dit funérarium”
“Non Môssieur! Le funérarium c'est au père Lachaise et Môssieur n'a pas voulu y aller non plus!”
“Parce que Madame croit qu'un cimeterre ça se visite? Pourquoi pas les cataclysmes?”
“On dit cimetière Môssieur! Et on dit catacombes aussi, là où je te pousserais volontiers!!!”
“J'vois pas de différence entre cimetière et catacombes, ni le rapport avec ce tableau des tours de Notre-Dame dont tu me lessives depuis une heure”
“On dit tu me bassines... pas tu me lessives!”
“Tu m'expliqueras la différence entre bassine et lessive! Mais Bon Dieu, qu'est-ce-que tu lui veux à ce foutu tableau?”
“C'est parce que je l'ai retrouvé la semaine dernière au fond de notre cave - tu sais, cet endroit sombre et nauséabond que tu avais juré de nettoyer quand tu aurais fini de trier tes collections de vieux machins dénichés dans des échoppes spécialisées - bref, un antiquaire vient de m'en offrir cinq mille euros!”
“Pourquoi tu ne le dis pas tout de suite au lieu de sècher des andouilles?”
“On dit chercher des embrouilles, pas sècher des andouilles. Je voulais que Monsieur se souvienne qu'il me l'avait offert pour moi toute seule et donc que ces cinq mille euros sont à moi”
“J'ai déjà dit à Madame que je ne m'en souvenais pas... alors c'est comme si Madame venait de le découvrir dans MA cave, non?”
(Soupir)
“Ne t'étonnes pas si un jour je pars avec un bouquineur italien qui ressemble au père Lachaise, et même s'il a une patte plus courte que l'autre, n'en déplaise à ta perspective!!!”
“Arrête de t'énerver... tu finis par dire n'importe quoi!”
 
 
Vegas sur sarthe
25 septembre 2014 4 25 /09 /septembre /2014 09:13

 

Et pour mon ciel, si je concoctais un bleu voyage, un bleu d’horizon, de Prusse, persan, maya, égyptien, un bleu d’azur, d’océan ou un bleu des Mers du sud ? Et si je mélangeais du bleu indigo, du bleu d’acier avec du bleu Méditerranée, du bleu canapé, du bleu saphir ou celui des abîmes de ses yeux ? Ou alors, je pourrais tenter du bleu de vitrail, du bleu de travail, avec celui de mes bleus au cœur, ou encore, du bleu céleste avec du bleu fumée. Entre lavande et dragée, entre col et cordon, j’ai dans l’esprit un bleu aigue-marine se mélangeant d’amour avec du gris de lin ; ou bien, du bleu nuit pour y lancer toutes mes étoiles publicitaires comme des bouteilles à la mer ! Oui, c’est ça !... Un bleu dont on ne revient jamais, un bleu planant, un bleu de rêve, un bleu roi sans trône, un bleu électrique sans lumière, un bleu où on n’y verrait… que du bleu, un bleu lavoir pour m’échapper un moment de ce trottoir…

 

Pour mes arbres d’automne, il me faudrait des forêts de jaunes enflammés, des jaunes de guirlandes de victoire, des jaunes d’offrande, avec des paillettes sensationnelles et des éclats éblouissants. Il me faudrait des jaunes intenses, des jaunes étincelants, des jaunes galonnés, princiers, impériaux, qui « s’oriflamment », qui s’illustrent, qui se pavanent et qui s’admirent dans les grandes parades. Il me faudrait un jaune qui soit tout à la fois ambre, chrome, miel, blé, rançon et champagne, un jaune aurore, un jaune de moisson comme la couleur de sa chevelure. Non ! Des jaunes volontaires, enrôlés dans l’armée de mes illusions clinquantes, des jaunes gangsters pour voler les chansons de ses rires, des jaunes neufs, tout frais éclos, des jaunes d’école, s’étalant sur ma toile folle. Là et là, je laisserai tomber des feuilles en or, tintinnabulant sur le parquet du trottoir, des feuilles intrigantes mais dont on ne se lasse jamais de voir les circonvolutions révérencieuses, des feuilles épuisées d’été, celles qui se détachent enfin, quand elles n’ont plus rien à attendre que l’aveuglement du peintre marginal ou l’allant du balayeur matinal…

 

Des ombres ! Je vais capturer des ombres blanches, des ombres exaltées, des ombres zélées, des ombres tapageuses, avec leurs pouvoirs insensés de chimères dépravées et tueuses. A larme blanche, la brûlante, je vais peindre leurs desseins sensationnels, leurs ultimatums démentiels, leurs perversions ensorceleuses ! Regardez, elles sont là, avec leurs pourtours de dentelles, leurs confins irisés, déjà posées sur cette aquarelle ! J’ai dans le fond de mon creuset du blanc, comme ses mains, comme ses dents, comme son drapeau, comme sa neutralité silencieuse, comme ses simagrées sentencieuses.

Donnez-moi des ombres noires, des ombres incantatoires, des ombres pour y laisser reposer mes pauvres histoires ! Au bout de ce pinceau d’abordage, je ferai danser leurs maquillages ; sous leurs masques insincères, je saurai traduire tous leurs mystères. Entre le crépuscule et l’aube, comme des amants pressés d’Amour, le noir et le blanc ne s’épousent-ils pas ?...

 

Dans mon tableau, je mettrai du brun ! Il faut retirer tous les marrons de mon feu intérieur ! Je ferai un tabac avec mon brun ! Bistre, cannelle, caramel, vanille, mordoré, sépia, ils seront tous en ordre de coloriage. La terre de Sienne sera mienne ! Tous mes abois seront bruns ; au firmament de mes contes citrouille, sans jamais la séquestrer  dans la rouille, elle paradera sur mon alezan, elle déjeunera au café au lait ou au chocolat, elle dansera sur le bitume, elle nagera dans le chaudron, elle se prélassera dans l’acajou. Brun ! Il sera brun comme la peau d’un arbre sur laquelle on tatoue ses je t’aime avec des flèches aiguisées et des cœurs entrelacés ; brun comme ses grains de beauté, telles des îles désertes sans mes baisers, tel un jeu de piste insensé, sur son visage et sur le bout de son nez. En seule escorte, s’il pointe un épais brouillard, sur ma nature morte, je saurai étendre un grand foulard… Il me faudra des touches de pastel comme la pluie sur un lac quand elle ricoche jusqu’aux berges opaques. Je devrai puiser dans l’arc-en-ciel pour irriguer cette œuvre essentielle…  

 

Pour mes fleurs, je chercherai les meilleurs échos de Lumière, même avec ces touristes et leurs regards moqueurs. Du rouge ! Oui ! Je peindrai à boulets rouges ! Ce rouge, il sera comme les décors des Enfers, comme des drapeaux maculés à la guerre, comme des tempêtes incendiaires ! Je capturerai le poisson rouge sur son épaule, celui pris dans les filets d’un tatouage espagnol ! Qu’il soit incarnat, saignant, écarlate, feu, pourpre ou vermeil ! Qu’il soit colère, honte, fard ! Qu’il soit coquelicot ou grenadine ou nacarat, comme ses lèvres sans faiblesse qui disent toujours non à mes légions de suppliques immorales contre sa forteresse.

 

Tant pis, avec ce rouge de tison, je ferai des verres, avec ce blanc, je ferai des vers, avec du rosé, je peindrai une galère… Enivré jusqu’aux yeux, dans ce tableau d’épouvante, les apparences seront mouvantes, elles seront éprouvantes, elles seront mourantes. Nul quai ne sera port d’attache, nulle émotion ne fera relâche dans tous les embrouillaminis de la gouache. Là, tout près, encore une fois, la Seine et ses remous pourront bien m’engloutir avec tous mes délires passionnés, ceux courant sur ce trottoir de chineurs désabusés. Enfin, comme chaque jour, le cœur en sang, l’âme insipide, j’irai cuver sur un lit de vain…

 

 

Pascal

23 septembre 2014 2 23 /09 /septembre /2014 13:17

 

C’est mon Tanguy, mon loupiot, mon titi, mon garnement ! Trente-neuf ans, il a mon p’tit oiseau ! Hé oui, il est toujours au nid ; sous notre aile, il n’a jamais songé à prendre son envol. Il n’y a que dans la peinture qu’il s’enfuit, mon moineau ; il devient alors un véritable oiseau voyageur.

Tout gamin, un jour de pluie, sa mère et moi, nous lui avons mis un pinceau dans les mains ; il a gouaché toute sa jeunesse avec une incroyable frénésie de couleurs. Marelle ou aquarelle, cinéma ou panorama, devinez ses préférences ! C’est un pur autodidacte, un authentique empathique, un doux rêveur, un spectateur de chimères, mais le docteur dit que ce n’est pas grave. Il vit dans son monde, entre plume et duvet, entre esquisse et fresque, entre réalité et fiction ; il y gravite avec ses arabesques mirobolantes et ses pensées intérieures.

 

Demain ? Mais c’est superficiel pour lui. Il vit du présent, de l’air du temps, des coups de vent et des compliments des chalands. Le matin, il s’installe devant sa cahute et il rentre en catalepsie créatrice. Pourtant, inlassablement, il peint des branches, des arbres, des feuilles, comme s’il voulait se percher sur leurs cimes.

Dans son ciel, notre Tanguy est toujours dans la verdure. L’été, l’automne, le printemps, les mois et leur magie ritournelle, sont ses reflets du moment. Chaque jour, posé sur son tabouret, il laisse ses sensations l’envahir et le déborder ; il a même des frissons en plein été, notre pioupiou ! Heureusement, sa maman est arrivée à lui faire garder son gilet toute la journée.

 

Au milieu des bouquinistes, il a son échoppe sur le quai Voltaire et quand un arbre lui jette une poignée de pièces d’or, il s’en empare avec son pinceau volontaire et il les peint toutes dans son tableau coffre-fort. Toujours inspiré, toujours obstiné, toujours souriant, dans une sorte de béatitude rédemptrice, il enlumine son tableau avec ses convictions de naturaliste extasié. Pourtant, je lui rentre dans les plumes, je lui dis bien de se remuer le croupion, que la vie ne se passe pas à picorer des sensations, mais il revient inlassablement à la maison pour casser la graine.

Il a ses soucis de teinte, ses colères sépia, ses doutes chromatisés quand une feuille particulière échoit sur son trottoir. C’est comme si la facétieuse Nature le mettait au défi de reproduire chacun de ses confettis ! Prompt à la besogne pittoresque, il s’emploie, il étale, il fond, il estime, il mélange ses carnations dans le creuset de sa palette enfiévrée. Jamais il ne cède à l’échec ; sur la pellicule de sa sensibilité, il reproduit ses scènes bucoliques devant l’affluence touristique. Si, par malheur, un nuage taquin filtre son ambiance, il reconsidère sa toile en sacrifiant les ombres, il ajuste les nitescences naissantes dans les proportions du halo baladeur, il assombrit ses couleurs en broyant du noir ; même son crayon a mauvaise mine…

 

Mon Birdy, il est toujours dans la lune. Perché au bout de son pinceau, il s’invente des jeux de lumière et des perspectives cavalières. Il a toujours une couleur ou deux à délayer dans un pot, un chatoiement en ébullition, un mirage à imprimer sur sa toile, une vision extraordinaire à exprimer avec son pochoir, un songe à étendre avec une éponge, un trait gominé à gommer…

Parfois, je soudoie des passants de complaisance avec quelques pièces. Alors, ils vont les échanger avec ses œuvres. Si vous voyiez tout son Bonheur ; il fait la roue, il pépie sa joie, il sourit comme un ange à qui on aurait rendu les ailes. Il négocie, il parlemente, il chuchote, il livre quelques-uns de ses meilleurs secrets de coloriage avec une plaidoirie de décorateur passionné. Notre cave est remplie de ses fresques et de ses dessins.

Si je vous disais que nous avons gardé son tout premier tableau ; il trône avec les autres sur la cheminée du salon. Je l’aime, mon petit, c’est peut-être pour cela s’il ne s’éloigne jamais du nid.

 

Quand il rentre du dehors, quand il vient se poser sur notre perchoir, il sent la peinture et la liberté, notre Tanguy. Il est heureux comme s’il avait plané toute la matinée. Dans ses yeux, on voit encore les paysages qu’il a traversés ; sur ses doigts, mille couleurs se superposent en surbrillance comme si elles voulaient s’imprégner de leur créateur et ses vêtements sont toujours maculés d’enluminures pétillantes. On dirait qu’il revient de son monde tant son aura danse comme une guirlande enflammée. Notre petit, c’est un oiseau migrateur entre le quai Voltaire et notre cage dorée.

Sur la table, cérémonieusement, il compte sa monnaie, il me réclame quelques billets et l’après-midi, il fonce jusqu’à la droguerie pour refaire le plein de ses ustensiles d’affranchissement.

 

Depuis quelque temps, il se peigne la houppe et il se rase le jabot, notre moineau. Il faut dire que j’ai remarqué une fauvette perchée dans une de ses branches favorites. Si je lui en parle, il s’embrase comme un rouge-gorge, il se renfrogne et ses cui-cui se perdent  dans ses explications embrouillées. Allez savoir, le long de la Seine, mon poulbot, il a peut-être trouvé une belle poule d’eau… Un jour, il va convoler ; j’espère le voir… enfin bagué…

 

 

Pascal  

23 septembre 2014 2 23 /09 /septembre /2014 06:35

 

Je suis las

Je suis là, sans moindre aspiration       

L’automne est là, tel qu’en lui-même

Et ses feuilles ne m’inspirent plus

Je suis las

Je me mêle les pinceaux,

Je mêle mes couleurs

Mais mon âme est ailleurs.

Je suis là,  empreint de lassitude.

Je suis las, là, au bout du rouleau.

 

Jak

22 septembre 2014 1 22 /09 /septembre /2014 08:05

 

« Surtout, ne te retourne pas, il va te remarquer !... Tu as vu son fabuleux coup de pinceau ?... Mine de rien, regarde avec quel enthousiasme bucolique, il parfait sa toile d’attouchements symboliques. Il peint les réponses à tous ses questionnements… Il a la patte d’un impressionniste, c’est flagrant… Il compose, il crée, il travaille, il attire la Lumière, il l’apprivoise, il la caresse, il la choie… Mais regarde ! Ce sont les jaunes flamboyants d’un Sisley en pleine gloire de son art ! Et ces verts pataugeant dans ces reflets incessants ! C’est Monet et ses Nymphéas ! Ce brun ! C’est du Degas sur une de ses pistes de danse ! Ce bleu, c’est du Renoir revisitant le miroir des joutes dominicales !... Il déclame sa passion à tous les temps… oui, à tout l’étang, si tu veux… Sur sa palette, chacune des déclinaisons de ses couleurs est une foultitude de sentiments intimes ! Mais c’est l’enfant naturel de Berthe Morisot et de Paul Cézanne, ce coloriste !...

Je te dis que c’est un génie ! Regarde comme il rentre dans ses abstractions profondes ! Il s’échappe de la grisaille du trottoir et il pénètre dans son œuvre ! Il vit au bout de son pinceau, il respire sa campagne, il est lui-même une couleur dans son tableau !... Il palpite, il est le héros cheminant dans sa toile ; à la fois soleil et pluie, printemps et automne, jour et nuit, il est l’auguste semeur de ses sensations picturales !...

 

Combien as-tu dans ton portefeuille ?... Allez, ne fais pas le chiche !... Sors les gros billets... Propose-lui deux mille euros pour sa toile, s’il refuse, propose trois mille ! On va se faire souffler cette bonne affaire !... Dégaine vite ton carnet de chèques !... Il accepte peut-être les cartes bleues…

 

Ne fais pas cette moue !... Toi, forcément, tu n’y connais rien en Art ! Tu es un incorrigible bé-o-tien !... Comment tu vois ça ?... Quoi ?... Comment ?... Plutôt enfantin, naïf ?... Genre Rousseau, Lefranc, Bombois ?... Ou plutôt expressionniste ?... Style : Rocher, Soutine, Rouault ?... Tu es un a-nal-pha-bè-te de la Peinture, un incorrigible philistin, un indécrottable ignare de la gouache !... Où je vois l’Art, tu vois du badigeonnage, où je détecte le Talent, tu vois du gribouillage, où je subodore la Virtuosité, tu vois du barbouillage !... Tu es désespérément un in-cul-te… L’aura des pastels, la saga des ombres, les lumières du clair-obscur, les fondations des perspectives, les projections sublimées, tout cela, ça te passe au-dessus de la tête !...

Quand nous avons visité la galerie Eric Dupont, tu bâillais, quand nous avons visité la galerie italienne, tu dormais, quand nous avons visité la galerie Maria Lund, tu ronflais !... Tout à l’heure, au restaurant, quand je te parlais d’Eugène Boudin et de Toulouse Lautrec, tu ne te souvenais que du cassoulet ! De Bazille à Dagnaux, tu réclamais une côte persillée !... Et de Van Gogh à Pissarro, tu cherchais les wc !...

 

Mais regarde donc toutes ces œuvres exposées !  C’est un enchevêtrement pictural sensationnel ! Chacun de ses tableaux exhibés est une avancée spirituelle dans l’immense champ de ses découvertes fondamentales !... Ressens-tu ce foisonnement d’impressions libérées dans le relief de ses paysages ?... Apprends à admirer !... Inspire-toi de ces allégories champêtres !... Chacune de ses œuvres est un poème, une ode, un cantique, un psaume, que dis-je : c’est une représentation théâtrale, une odyssée, une parabole, non, mieux ! C’est une partition,  une sonate, un hymne, une symphonie !...

Regarde les enluminures imprégnées sur la gamme intense de ses décolorations ! Il a tout compris, ce peintre ! Il maîtrise son art comme un maestro sa baguette !...

 

Ici, admire l’éblouissement intemporel, l’exaltation sublime, l’interlude passionnant, la magnificence de l’imagination, la doucereuse altercation incantatoire ; là, observe la transgression, la digression, la pamoison, la supposition, l’interprétation suggestive, l’étonnant irréel !...  

Quoi ?... Comment ?... Je te barbe avec mes traductions viscérales ?... Je te raconte chacun de mes frissons intimes, touche mon bras, et toi, tu joues les critiques d’Art ! Voilà bien une belle façon de me récompenser de toutes mes explications artistiques !... A Paris, quand je te parle d’aquarelle, tu penses Moulin Rouge et bagatelle ! Quand je te parle de peinture, tu penses Salon de la Voiture et quand je te parle de retable, assurément, tu penses Champs-Élysées et ses meilleures tables !...

 

Mais non, ce n’est pas un nouveau caprice !... On va les installer dans l’entrée ; ils seront comme une suite logique, entre notre parc arboré et notre salon décoré. Nous aurons la clarté de ces tableaux même en hiver !... Tu vas voir la tête des voisins, avec leurs pseudo-pointillistes, leurs pâles copies des Seurat, Signac et compagnie ! On va les ébahir avec ma culture pittoresque !... Ha, tu as de la chance que je sois une véritable artiste. Mes sensations à fleur de peau, mes inclinaisons poétiques, mes divagations béates, nous sauvent encore de ton incurie sidérale… A toi tout seul, tu es « mes scènes de ménage… » oui, mécène de ménage, si tu veux…Constate toute l’application qu’il emploie pour signer son œuvre…  Allez, donne-moi tous tes euros, j’y vais et surtout : ne dis rien, laisse-moi négocier avec cet artiste ; lui et moi, nous nous reconnaîtrons… »

 

« Hé, Mimile, depuis un moment, y a deux touristes intrigants qui lorgnent sur tes toiles ! Tu va peut-être enfin les vendre, tes peintures !... »

 

« C’est pas les miennes, Lucette, c’est celles de ma gosse, celle qui est à la maternelle ! Moi, je n’ai jamais été foutu de tenir un pinceau ! Depuis ce matin, j’essaie de les signer Zézette mais j’ai un mal fou avec mes gros doigts… »

 

 

Pascal

21 septembre 2014 7 21 /09 /septembre /2014 17:45

 

C'est ce peintre avec les cheveux gris, c'est lui qui a laissé s'échapper les couleurs, sa veste en témoigne et son air coquin... Il en faut toujours un pour jouer ce rôle que l'on dira décisif et devant un tribunal on le dira fautif, mais il n'est qu'un acteur parmi tant d'autres, mu comme les feuilles qui voltigent et viennent tacher le sol.
Les couleurs n'ont pas manqué cette occasion de décamper des tableaux de ce peintre amoureux des quatre saisons des arbres, elles s'expriment haut et fort. Le pantalon de celui-ci bleu de travail ose la confrontation au rouge coquelicot du pantalon de la dame, cette autre virevolte enrubannée d'orange mandarine, les feuillages se hâtent de virer des verts aux jaunes, et plus loin, se cachant un peu, par timidité sûrement cet immeuble s'habille d'un bleu-vert électrique. Allez encore un peu de rouge-sang ici, de sauge, de vert-gris, d’anthracite, de canari, de chrome, de bouton d'or, de cannelle, de ventre de biche, et l'affaire est dans le sac !
Bien content le peintre grisonnant de la farce qui se joue là, sans que personne ne la voit et pourtant tous y participent. 

 

 

Miche

21 septembre 2014 7 21 /09 /septembre /2014 09:36

 

J'aime flâner sur les quais de Seine
Parmi les toiles et les gravures
A même le trottoir
J'aime chiner chez les bouquinistes
On trouve de tout
Des parchemins, de très vieux livres.
J'aime croiser ces drôles de gens,
Leurs éventaires, tréteaux branlants
Ou vrais coffres à trésors
Qui vous dévoilent leurs secrets
Si vous savez faire
Et si vous prenez le temps. 

 

 

Marief

21 septembre 2014 7 21 /09 /septembre /2014 07:56

 

Feuilles dorées qui tombent

Si sœurs et toutes différentes,

Sur des gens qui bavardent

Tous des humains, si différents.

Pendant ce temps le peintre copie ses toiles.

Elles sont toutes un peu différentes,

Et si pareilles.

 

 

Nounedeb

20 septembre 2014 6 20 /09 /septembre /2014 18:42

 

C’est bizarre, je refais toujours le même tableau, ça fait 20 ans que je peins des arbres, j’ai un tic, j’ai un toc, j’sais pas pourquoi, j’sais rien faire d’autre, j’ai pas d’idée , pas d’imagination, les gens qui passent me disent : c’est beau, et ils poursuivent leur chemin sans acheter. Mais ils ont dit c’est beau, alors ça m’encourage…Et j’en refais à nouveau. J’en ai 350 d’avance, c’est Dédé qui me les garde, là-bas dans sa vieille péniche bleue. Il dit toujours Dédé : c’est bon, un jour, le succès viendra. Va te faire f…, que je réponds, tu sais bien que c’est des bobards, et que mes tableaux ne valent rien.


C’était ça où le suicide, le jour où Guiguitte m’a largué, j’aurais pu sauter, c’est Dédé qui m’a rattrapé par la manche, il a dit : Tintin, tu vas pas nous faire ça, allez, viens boire un coup ! Je l’ai suivi dans sa baraque flottante, il m’a débarbouillé et il m’a dit : tiens, essaie donc ça pour voir. CA, c’étaient des vieux tubes et des vieilles toiles que Colette avait laissées avant de le quitter pour un petit con de « bourgeois » de Paname. Ah, ce qu’on a pleuré tous les deux ! J’ai failli en faire des aquarelles ! Et puis, je m’en suis remis et maintenant, je barbouille des petites gouaches toutes pareilles, un peu naïves, un peu simplettes, mais ça met de la couleur dans ma vie, Dédé a dit, on va en mettre partout ici, ça va égayer nos chiennes de vies.

Dédé, j’l’aime bien, c’est mon pote, il me comprend, je crois même qu’il m’aime un peu. Moi je l’aime itou et sans lui, je ne serais pas ici à peindre mes petites toiles que personne n’achètera jamais, mais je m’en fous, l’important, c’est d 'être heureux, pas vrai, p’tit gars ?

 

 

Cloclo

20 septembre 2014 6 20 /09 /septembre /2014 16:55
 
L'automne arrive, les arbres se vêtent de couleurs chatoyantes. Sur les berges de la Seine, quelques passants se promènent le long des quais à la recherche d'un bouquin, d'images voir même d'une toile peinte par quelques peintres en quête de renommée. Victor fait partie de ceux là, assis sur un tabouret, il donne une dernière touche à son Paris illuminé. Il n'a encore rien vendu aujourd'hui mais il ne désespère pas, un jour, c'est sûr, ses toiles seront exposées au musée d'Orsay voir même au Louvre…
 
 
Aimela
 
20 septembre 2014 6 20 /09 /septembre /2014 16:51

 

Voltaire, sur ton quai
Traînent chineurs et promeneurs.
Les bouquinistes attendent les bouquineurs
Passe le temps.
À sa façon, le barbouilleur,
Profite d’un début d’automne en couleur.
Gueules ouvertes
Les boîtes vertes
Régurgitent trésors et trouvailles.
Aux aguets le chineur
Trouvera-t-il son bonheur ?
Marchandera-t-il son coup de cœur ?
Revues et gravures changeront de mains
Demain sous la lumière
Elles dormiront dans un appartement branché
 « Le bouquiniste en …rêve »
Il sent que cet automne aux mille couleurs
Lui apportera enfin, à lui aussi
Gloire et lumière…
 
Tout ça grâce à Voltaire !
 
 
Jamadrou
20 septembre 2014 6 20 /09 /septembre /2014 16:45

 

J’suis le bouquiniste
Qui ne gagne rien avec ses bouquins
L’occasion ça n’intéresse plus l’amazone
La liseuse c’est pas pour moi
Mes livres ont perdu leurs feuilles
Qu’on ramasse à la pelle
J’me suis mis à l’aquarelle
L’eau de la Seine m’inspire
Sous les ponts les soupirs
Cette nuit je fermerai ma boite
J’irai vendre à Montmartre… 

 

 

Josette

20 septembre 2014 6 20 /09 /septembre /2014 14:34

 

Au final,

qu'est ce qu'un artiste ?

 

No Name

20 septembre 2014 6 20 /09 /septembre /2014 12:03

 

 

J'fais des toiles
Des p'tites toiles
Que nul ne réclame
Du côté d'Notre Dame
Des toiles du dimanche
Sur qui nul ne s'penche
Pour tromper l'ennui
Dans ma maigre vie...
J'fais dans l'arbre nu
A l'automne revenu,
Quand j'en aurai ma claque
J'tournerai casaque
Et du côté d'Montmartre
Avec mes bleuâtres,
Mes jaunâtres, mes façons,
Mes pinceaux, mes cheveux longs
Je poserai l'tabouret
Qui m'sert d'chevalet
Contre un autre muret gris
Pour tuer encore l'ennui,
J'ferai mon numéro
Dos aux badauds
Les dimanches, dans ma vieille veste
D'artiste modeste...

 

Jill Bill 

19 septembre 2014 5 19 /09 /septembre /2014 08:59

 

 

Très cher Maximilien pourquoi pleurez vous donc ?,

Ma chanson vous chagrine ? Je n’ai pas mis le ton ?

Allez reprenez le sourire et alors gaîment

Sablons à votre fils, il l’a bien mérité.

Sans lui aujourd’hui je ne serais l’épousée,

De son ami favori, céans mon cher mari.

Toujours je lui dirais un immense merci.

 

Quoi, encore des larmes vous redoublez vos pleurs ?

Je sais vous regrettez que je ne sois sa femme

L’amour très cher ami ne se commande pas.

 

 

Jak

18 septembre 2014 4 18 /09 /septembre /2014 07:05

 

Regardez-la, ma Belle ! N’est-elle pas magnifique avec sa robe de printemps, sa coiffure de fleurs d’oranger et son collier de perles ? Admirez la finesse de la dentelle, les boutons nacrés, le col et les manches froufroutés, la taille millimétrée ! C’est un véritable écrin et c’est mon inestimable bijou qui se cache dedans ! C’est mon icône, mon flambeau, ma ligne de vie ! Ecoutez, écoutez tous ! Elle va parler de nous, de l’avenir et de nos futurs enfants…

 

Moi ?... Je l’aimerai sans jamais la trahir. Auprès de l’étang, loin du tumulte des gens, nous irons admirer nos vingt ans perpétuels et sur la balançoire alliée, j’aurai toujours des nouvelles histoires pour éblouir ses regards passionnés. On ira sous le grand chêne et le lui répèterai tous mes je t’aime. Pour ma Belle, j’en ai plein, en guirlandes, en ribambelles ; ils se disputent, à la sortie de ma bouche, la faveur de les lui susurrer. « Je t’aime » en chantant, « je t’aime » en riant, « je t’aime » en espérant, « je t’aime » en croyant, en crevant, en crânant, en criant ; sur notre chemin, je les sèmerai à tous les instants. Chaque seconde, je lui renouvellerai ma déclaration ; elle est mon ivresse, ma richesse, ma maîtresse, ma promesse. Avec elle, j’ai appris les soupirs énamourés, l’attente enchanteresse, les vœux lancés aux étoiles, les secrets des boules de cristal, le désespoir de l’éloignement, la frayeur de la Solitude. Sans elle, je ne suis qu’un pauvre malandrin, qu’un fantôme sans lendemain, qu’un insipide faquin, un parfum sans fleur, un fruit sans saveur, un paysage sans relief…

 

Là, dans une forêt propice, on écoutera la musique du vent dans les branches complices et si elle rougit un peu, à force de doux sacrifices, on laissera le soleil jouer avec nos ombres entrelacées aux défis de leurs mille caprices. Cachés, au milieu des fleurs, sur son corps, je dessinerai des arcs-en-ciel de douceur; on demandera aux nuages de voiler notre pudeur et aux oiseaux de chanter en chœur. A la lune descendante, je lui raconterai des aventures exaltantes, des histoires de serment, qui durent jusqu’à l’aube montante. Je serai le coquin de ses escarpins, le doux corsaire de son corset, le Cupidon de ses jupons ; je serai le chef d’orchestre de tous ses cantiques, le confesseur de toutes ses prières si peu catholiques. Dans les campagnes, on entendra les chansons de nos corps, l’unisson de nos cœurs. L’écho amusé des cavernes, les ricochets des étangs, les rires des rivières, seront nos seuls témoins champêtres.

 

De contes en romans, de recueils en sonnets, on écrira nos plus belles pages d’Amour avec nos salives tempête scellées aux baisers du meilleur et, le pire, on le laissera croupir aux oubliettes. Pour que jamais rien ne cesse, on boira des liqueurs d’Amour, on se régalera de festins de Tendresse, de sorbets de Désir, de friandises de Caresse. Des pêches aux abricots, des pommes aux raisins, je croquerai tous les fruits dans sa main ; on recrachera les noyaux et les pépins, comme des embûches et des grumeaux, des pluches et des sanglots. De nos querelles joueuses, on n’aura que des conclusions heureuses ; de nos différends, dans l’étang, on noiera chacun de ces tourments ; de nos orages ou de l’Ennui, on restera toujours sous le même parapluie.

 

Je serai son seul amant, celui des jours de pluie, celui des jours de soleil, celui des mois d’hiver, celui qui fleurit nos primevères, celui qui rougit la treille. Je défendrai ses nuits pour que jamais des cauchemars viennent accaparer notre Histoire. Je serai son héros, son galant, son matelot, son prince charmant, son bourreau, pour toutes ses suppliques, tous ses encore, toutes ses griffures, tous ses râlements.

Impatient, chaque matin, je poserai un baiser sur son visage et chaque soir, je le caresserai pour ne jamais me sevrer de ses contours. Chaque saison sera une autre médaille à la gloire de nos années de Passion. Chaque fois que je l’admirerai, j’aurai des armées de frissons, chaque fois que je la penserai, j’aurai des tonnes de sensations. Quand elle sera loin, je dépérirai ; quand elle sera près, je renaîtrai.

On tissera tous nos bonsoirs avec nos corps enlacés ; les draps blancs seront notre seul emblème, celui de la volupté. La belle image réclame mes outrages. Elle est la seule habitante de tous mes rêves, l’unique sirène allongée sur ma grève, la princesse de mon glaive.

 

Un jour de Félicité, un jour de feu d’artifice, il faudra bien admettre l’inéluctable Miracle ; de nos allants canailles, comme une sanction divine, naîtra le fruit de ses entrailles. Regardez, dans ses yeux, on voit sa chambre, sa tapisserie, son berceau ! La Nature nous réclame son Impôt, les dividendes de notre Amour ; un enfant, nous mettrons au jour !

 

Après l’authentique Passion, on apprendra à durer. De la bouche des Vieux, j’ai entendu parler de Tendresse, de Connivence, de Sagesse, de Patience, d’Indulgence ; on fera comme eux, on aura des grands élans de souvenirs, ceux qui rallument les sourires, ceux dont je ne connaîtrai jamais les mots pour les écrire ici.

Enfin, si elle est malade, si elle est rompue de pommades, je serai définitivement blessé et si elle meurt, un jour de tumeur, je serai concassé. Alors, ensemble, comme un seul corps d’armée, sur l’aile d’un ange compassé, nous trouverons bien un paradis pour nous accueillir, nous, et nos guirlandes d’élucubrations amoureuses. Sur le serment du Silence, je le confesse, ce sont tous les sorts que je nous réserve.

 

A cette ultime seconde de Vérité, que ses sortilèges aiguisés et sa poudre aux yeux ne cessent jamais leurs effets. Elle est la reine de notre Destin. Alors, lève ton verre, ma Belle, lève-le bien haut, bien plus haut, aux Cieux et plus haut encore ; que les bulles de ton champagne éclaboussent et arrosent mon visage fiévreux d’une éternelle Passion amoureuse…  

 

Regardez-la, ma Belle ! N’est-elle pas magnifique avec sa robe de printemps, sa coiffure de fleurs d’oranger et son collier de perles ?...

 

 

Pascal

15 septembre 2014 1 15 /09 /septembre /2014 19:41

 

S'il faut le faire
Alors je leve mon verre,
Pas pour toi,
l'homme qui boit
Mais pour le reste,
qui m'interesse.
C'est Ce demain,
auquel je tiens.
Alors je leve mon verre,
pensant à toi, mon frère.

 

 

No Name

15 septembre 2014 1 15 /09 /septembre /2014 08:16

 

Atchoum ! Atchoum ! Atchoum !... Et encore cette foutue crise d’éternuements ! En plein pendant le discours de ma chère nièce ! Avec mes oreilles bouchées, je ne l’entends même pas ! Elle ne s’interrompt plus, elle m’ignore, elle me tient à distance, elle me snobe. C’est la digne fille de ma belle-soeur, on voit qu’elle a bien potassé son discours d’épousailles, et dire que j’ai soigné ses amygdales… C’est qu’elle est organisée, la gamine, elle nous sort son prêche comme un exposé de concours de couple… Pas une larme, pas un frisson, pas un bégaiement, c’est du grand art… Atchoum ! Atchoum ! Atchoum !... Mais non, ce n’est pas contagieux, c’est un simple rhume…

 

Ma femme me l’avait bien dit de ne pas aller à la pêche, la semaine dernière. Mais le climat était tellement agréable, tellement propice ! Début septembre, on a eu des journées magnifiques, le temps suspendait son vol comme s’il n’était pas pressé de basculer en automne ; c’eût été un péché de ne pas en profiter ! Pour une fois que j’avais fermé mon cabinet… Ha, quand j’y repense…

J’avais emprunté la barque de mon frère ; oui, là, c’est l’hirsute pansu, à la barbe fleurie, juste en face de moi. Il ne se sert de son bateau qu’au moment de l’ouverture du canard. Tôt, le matin, j’avais pris mes cannes, la grande épuisette et mes bottes… C’est le troisième mouchoir que je sors depuis le début de la journée ! Quoi ? Je viens de me moucher avec la serviette ?... Quelle idée aussi de faire des serviettes comme mes mouchoirs… Atchoum ! Atchoum ! Atchoum !... Mais non, ce n’est pas contagieux, c’est un simple rhume…

 

Et les salves d’éternuements dans l’église ! Ce n’était pas à cause du parfum des cierges ou de la poussière, voire du bois patiné ! A décrocher les statues des Saints ! Du haut de son supplice, même Jésus me faisait les gros yeux ! Et notre vieux curé, le Léonce, en plein sermon, il s’arrêtait, vexé, à chacune de mes quintes ! J’ai soigné son arthrose, à celui-là ! En sortant, j’ai failli éteindre toutes les bougies de la procession !... Dans les vitraux, les confettis, c’était moi ! Ma femme m’a donné tellement de coups de pied que j’ai l’impression d’avoir une jambe de bois ! En plus de cet enchifrènement, maintenant, je boite !... Avouez que c’est regrettable !... Atchoum ! Atchoum ! Atchoum !... Mais non, ce n’est pas contagieux, c’est un simple rhume…  

 

Tout était calme ; j’ai ramé jusqu’au milieu de l’étang. L’aube s’arrangeait avec les frondaisons et les effets de miroir me renvoyaient des images d’impressionnistes. Sur les berges, j’aurais pu tout aussi bien voir Monet en découdre avec son chevalet ou Sisley en plein déménagement pictural, Caillebotte en train de racler le plancher du psyché ou bien même Renoir endimanchant son œuvre avec une apothéose de couleurs mais j’étais seul et c’est bien quand on va à la pêche…

J’ai dérangé une troupe de grenouilles quand j’ai traversé un champ de nénuphars ; la brume se levait lentement sur l’onde et la clarté féerique lui donnait des effets de chimères dansant un étrange chahut sabbatique… Atchoum ! Atchoum ! Atchoum !... Mais non, ce n’est pas contagieux, c’est un simple rhume…

 

Notre monsieur le maire voulait m’interdire son Hôtel de Ville ! Tu parles d’un prétentieux ! Pourtant, on se connaît depuis cinquante ans, tous les deux ! On était sur les mêmes bancs, à la communale, on était dans le même régiment, j’ai même calmé son lumbago, récemment. Dans sa mairie, il jouait les officiels avec son écharpe et sa Marianne de salon !... Il fallait le voir avec ses ronds de jambe et ses sourires d’administrateur précieux ! Atchoum ! Atchoum ! Atchoum !... Je n’ai pas pu m’empêcher de décorer ses alentours avec quelques sternutations de bon aloi ! C’est ma femme qui n’a pas apprécié ! Sur les côtes, je dois avoir les traces de ses coups de coude !... Atchoum ! Atchoum ! Atchoum !... Mais non, ce n’est pas contagieux, c’est un simple rhume…

 

J’étais au mitan de l’étang. Avec application, j’ai planté mon plus beau ver de terre sur l’hameçon puis j’ai tout glissé dans l’onde avec d’infinies précautions… C’est fou comme les bruits portent sur l’eau. Au loin, un coucou cancanait tandis qu’un corbeau coassait sa fable, sans doute à un Goupil de sous-bois. A cette heure, tous les arbres devaient s’ablutionner dans l’étang car leurs frissons dans les branches laissaient se décrocher des feuilles multicolores en échange équivoque.

Tout à coup, mon bouchon s’est enfoncé à la verticale comme s’il avait été aspiré par les profondeurs !... J’ai récupéré ma canne, j’ai ferré, je maniais un gros poisson !... Après une lutte féroce, je suis arrivé à le capturer dans mon épuisette ! C’était une carpe d’au moins dix-huit livres !... J’étais trop penché sur mon trophée et ce qui devait arriver, arriva. C’est en voulant le remonter à bord que j’ai basculé en avant… J’ai tout perdu ! Le poisson, l’attirail, les rames !... Péniblement, je suis revenu jusqu’à la berge en nageant, c’est là que j’ai attrapé cette crève ; au large des nénuphars, j’ai recroisé les grenouilles, elles avaient l’air de se moquer de ma façon de nager… Atchoum ! Atchoum ! Atchoum !... Mais non, ce n’est pas contagieux, c’est un simple rhume…

 

Mais bien sûr, j’ai les bons remèdes, les bonnes potions, les bons onguents ! Les cataplasmes, les bains de pieds, les inhalations, les tisanes, rien n’y fait ! Je dors même contre ma femme avec un bonnet et des chaussettes !... Quoi ? Si je suis allé voir le docteur du village ?... Vous en avez de bonnes, vous ! Mais c’est moi, le docteur !... Atchoum ! Atchoum ! Atchoum !... Mais non, ce n’est pas contagieux, c’est un simple rhume… 

 

 

Pascal

15 septembre 2014 1 15 /09 /septembre /2014 08:15

 

 

Famille, belle famille, amis, cousins, voisins et ceux que je ne connais pas, bande d’assassins, je vous remercie tous, ici présents, d’être venus assister au grand spectacle avec vos sourires hypocrites, vos conseils avisés et vos silences faussement jaloux.

Nos familles se sont arrangées pour que puisse avoir lieu ce mariage. On ne m’a rien demandé puisque je suis la sacrifiée sur l’autel de tous leurs intérêts. La dot, la bague au doigt, les champs qui s’agrandissent, la terre du haut qui file maintenant jusqu’à la rivière, les greniers qui doublent, le cheptel qui grossit, le fumier qui s’épaissit, voilà bien des arrangements en dehors de mes prétentions de jeune femme.

On a même invité le notaire Machin pour capturer toutes les signatures au bas de son parchemin ; il s’est emmerdé pendant tout le repas ! C’est plein de graffitis et d’additions sur la nappe ; pour sa seule occupation, il a calculé encore son pourcentage, ce vil tabellion ! Il ne voudrait pas en louper une miette ! Regardez, c’est lui qui se mouche comme s’il voulait se cacher derrière sa serviette !

Soyez rassuré, mon père, je serai à la hauteur de vos attributions. Sur son grand livre d’escompte, vous ne verrez, de ma part, nulle rature qui puisse vous faire affront. Ma mère, il serait peut-être temps d’aller prier pour mon salut…

Les cris de la guerre se rapprochent ; elle viendra bien chercher mon mari même s’il se cache, ce couard, au fond du puits. Mariée, presque neuve, je revendique déjà le statut de veuve. Non, mais vous avez vu la gueule du bonhomme ?!... Je ne sais pas ce qu’il a en tête, depuis ce matin, il ronge son os, il me parle comme à une quelconque soubrette ; me voilà déjà loin de la fête, je me marie et je ne suis pas à la noce. Aujourd’hui, sous mon voile, je suis prisonnière et ce soir il faudra que je rejoigne sa litière…  

 

Mais regardez ma sœur aînée et son mari, à côté du mien ! Ils tirent des plans sur la comète, ils recalculent leurs dividendes dans la hiérarchie de la famille ! C’est qu’il faudra bien que le père redistribue l’or de la maison ! N’est-ce pas, ma sœur ?... Tu as remarqué ?... On est en train de boire le champagne qui reste de ton mariage. Chez nous, rien ne se perd, tout désaltère !... Je n’ose pas goûter les petits gâteaux, il me semble les reconnaître…

Quoi ?... Quels sont vos mystères et vos messes basses ?... Ton mari a été appelé dans la Cavalerie des Dragons d’Arcueil ?... Toi aussi, ma sœur, il te faudra prendre l’habit noir, l’habit de deuil… Mais oui, ma mère, pour cette occasion de mariage, vous auriez dû sortir vos bijoux d’aïeules ! Vous aviez la figure bien rougie, ce matin ; vous aussi, vous attendez la guerre ?...

 

En bout de table, regardez ce soupirant inconnu, à la flamme du soldat caché, derrière cette fleur trop blanche. Quel est cet invité au regard inquisiteur ? Est-ce un aspirant souffreteux, un cuirassier à la jambe d’acier, une ombre de mitrailleur, un reste d’artilleur ?... Et vous, mon père, maître des hautes oeuvres de mes sévices, êtes-vous fier de tous vos artifices ?... Avec ma bague au doigt, maintenant, c’est vous le roi. Je vous vois replet comme peut l’être un grand gagnant de courses de haies. Feriez-vous un bon militaire, un général solidaire ou avez-vous des accointances dans les bons ministères ?... Ma mère, dans mon trousseau, vous auriez dû entasser plus de mouchoirs brodés, car à cette heure de bourreau, j’ai bien envie de pleurer…  

 

Et toi, ma plus jeune sœur, esclave soumise aux intransigeances sans cœur, enchaînée au bon vouloir de nos parents, quelle sera ta punition ? Aux calculs de leur affection, prendras-tu le voile pour garder la vertu de notre famille ?... Est-ce que ton compte est réglé avec le fils de la propriété de la terre d’en haut ? Est-ce que toi aussi, la nuit, tu cauchemardes en appelant la Camarde ?... Vois-tu encore le gentil fils du meunier, celui avec son uniforme de jeune rondier, ou dort-il déjà au fond d’un triste charnier ?...

Et vous, mon père, vieux sire, capitaine d’holocauste, reprenez donc encore de cet élixir ; en seule riposte, si cela pouvait vous empoisonner… Ma mère, chantez doucement. La folie est à l’asile ce que l’Amour est à l’illusion. Rangez donc vos pleurs d’opérette ou déplacez votre coupe ; ils ne pourraient que diluer ce vin de soupe dans un insipide brouet de piquette.

 

Et toi, mon cher cousin, si pauvre, si banal, attablé pourtant à ce banquet infernal. Tu me dévores encore des yeux comme si tu n’avais rien mangé. Tu es le seul invité qui me réjouisse le coeur car j’aime bien l’amour que nous faisons, tranquilles, loin de tous ces hôtes invertébrés. Tu es si pauvre que les seuls papillons que tu puisses porter, ce sont ceux que tu m’apportes, cachés dans ta main, quand nous roulons dans la luzerne et le romarin. Si pauvre que le seul costume qui te siéra sera celui d’un jeune grenadier soupirant sa mort au fond d’une tranchée. Mon père, rangez donc votre sourire de baïonnette, vos effets de mitraillette et vos idées de prison. Je n’ai que faire de vos sommations. Ma mère, oubliez vos incantations et vos poisons ; dans sa poche, il a son affectation, si loin, dans une terrible garnison…

 

Et vous, le peintre photographe invisible, celui qui lit tout de mes mots inaudibles, celui qui traduit un à un tous ces attablés nuisibles, quelle sera ma vie sans délivrance, quelle sera ma part de chance, quelle sera ma sentence ?... Vous qui me regardez avec tous vos pinceaux, vous voulez trinquer avec moi, au hasard du lendemain ?... Alors, je lève mon verre à l’Avenir, aux sortilèges de la guerre, avec la même envie de tous vous vomir… 

 

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Pascal

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